Un peu en marge de l'actualité, je voulais profiter de ces lignes pour parler d'un livre dont j'ai tourné la dernière page hier soir.
L'origine de la violence est un de ces bouquins magnétiques qui combine la séduction du polar et le ravissement de l'intelligence.
Un jeune prof de français, qui fait visiter le camp de Buchenwald à ses élèves, découvre, sur une photo exposée, un personnage dont son père se révèle le sosie.
Après quelques recherches, il apprend que le prisonnier du camp de concentration est son grand-père. La suite est une enquête au sein des deux familles, celle où il a vécu et l'autre, dont il ignorait tout.
Ce qui est remarquable, c'est cette capacité à universaliser ce qui pourrait n'être qu'une histoire de famille comme la littérature en produit tant. L'histoire de la famille Fabre devient alors, par extension, notre propre Histoire.
Suivant le même principe, ce texte porte en germe ses “hypertextes”. Ainsi, la galerie de portraits brossée au fil du récit, trouve son prolongement dans les pages sombres des livres d'histoire. Ilse Koch, “la chienne de Buchenwald”, comme Martin Sommer, un des pires bourreaux qu'ait connus le camp de Buchenwald, suscitent des recherches (auxquelles je me suis adonné) dès qu'il apparaît que le récit s'appuie sur la vérité historique.
Le propos de ce roman est l'obstacle récurrent auquel se heurte le héros, face à sa famille mais aussi face à sa nouvelle petite amie allemande et qui est résumé par une phrase prononcée par son grand-père “officiel” sur son lit de mort : “l'essentiel c'est l'oubli, tout savoir pour oublier parce que la vie est dans l'oubli…”.
Fabrice Humbert s'est certainement souvenu de la postface de “si c'est un homme” (Primo Levi), signée par Angelo Rinaldi : “…si la littérature n'est pas pour rappeler les morts aux vivants, elle n'est que futilité.”