Ce qui est plaisant avec les locuteurs anglo-saxons, c'est qu'ils fabriquent autant de mots de l'année qu'ils ont de comités, d'associations, de sociétés qui veulent se singulariser en fabriquant de faux palmarès selon leur envie promotionnelle (le palmarès est une habitude très anglo-saxonne qui nous a valu en France des choses innommables comme le Top50 ou le Hit-Parade ou des stations de radio FM pour jeunes et moins jeunes qu'il aurait mieux valu bannir avant de libéraliser les ondes). Ainsi, le New Oxford American Dictionary avait élu unfriend comme mot de l'année. Unfriend est un terme employé dans Facebook et cela semble donc tout de suite plus branché. Mais quand on passe à un concurrent comme le Global Language Monitor, cela devient Twitter. Là, attention ! c'est du sérieux, on ne vote pas, on se réfère à un algorithme qui détermine quel est le mot le plus populaire, de manière totalement neutre et prétendument scientifique, alors que Twitter draine un public scripteur dix ou vingt fois moins nombreux que Facebook. Les deux sites sont concurrents et il est obligatoire que les différentes associations pour le mot anglais le plus populaire soient aussi en concurrence. Elles choisissaient sans doute auparavant dans la presse papier en regardant vaguement ce que l'on achetait le plus et maintenant elles regardent ce dont on parle sur la Toile. Et on assiste au combat de néo-titans à pied d'argile : Facebook contre Twitter pour le titre du mot de l'année ! Il faut compter encore avec les mots de l'année des différents dictionnaires anglais qui se sont déroulés auparavant et qui font alors l'objet d'annonces publicitaires, exactement comme pour des Miss Pomme de terre issue de Picardie élues par un comité local. C'est fort ridicule, mais les Britanniques et les Etatsuniens ne comprennent pas encore que toute cette publicité grossière les dessert à la longue et que plus ils en useront, moins on croira leurs classements, même en faisant semblant de croire à des algorithmes sacrés et surtout secrets. La première question est celle de la légitimité et de la pertinence de tels classements qui bouffent de la place dans les informations prétenduments nouvelles. C'est du bruit avant tout, qui se nourrit de ce qui est censé faire le plus de bruit.