Est-ce l'esprit critique, qui fait partie de la tradition intellectuelle française ? Ou plus généralement une tendance générale à porter notre regard sur ce qui ne fonctionne pas, ce qui manque, les trains qui n'arrivent pas à l'heure? En tout cas, il est fréquent de ne plus arriver à décoller son regard de ce qui ne va pas, de ce qui pose problème en nous et chez les autres. L'expérience montre pourtant qu'il est généralement plus intéressant et productif de porter en priorité son attention sur ce qui fonctionne, ce qui marche : sur les points forts. Ce sont des ancrages pour la confiance, celle que l'on développe en soi, et celle qui se communique à l'entourage. Et la confiance est la clé des belles réalisations.
Sophie, directrice de l'organisation dans un groupe financier, anticipe avec anxiété les entretiens individuels avec une nouvelle équipe qui lui est rattachée. Elle sait que ces collaborateurs ont été plutôt maltraités au cours des derniers mois, et qu'ils ont de nombreux griefs - justifiés - à faire valoir à l'entreprise. Elle craint "l'ouverture du bureau des pleurs". D'avance, elle soupire à l'idée de devoir faire barrage à leurs récriminations, et je vois que son visage se crispe rien que d'y songer. Comment faire ? Une option qu'elle n'avait pas envisagée est de les interroger sur ce qui leur plaît dans leur poste, sur ce qui marche bien, ce qui les motive. Non pas de manière incidente ou anecdotique, bien au contraire: les questionner concrètement, précisément, sérieusement, leur faire creuser ce sujet que l'on passe trop souvent sous silence : leur plaisir au travail, leurs satisfactions, les réalisations et résultats dont ils sont fiers. Un mois après, elle est toute surprise de constater que ses entretiens ne se sont pas du tout passés comme elle l'appréhendait. En choisissant de travailler le positif, elle a poussé chacun à détailler ses points forts et mis ainsi l'accent sur les points forts et les ressources. Elle a ainsi construit de la confiance avec son équipe, le socle sur lequel il lui sera, ensuite, possible de construire collectivement, même dans les difficultés.