Une fois n’est pas coutume, j’arrive après la bataille. Tout a déjà été dit sur les blogs illustres comme celui du Faucon, celui de l’Hérétique, ou celui du Toréador, concernant le sujet des minarets en Suisse, devenu tarte (à la crème) en quelques heures. Le peuple suisse (entité mal définie) a parlé, et a assez clairement dit qu’il ne goûtait pas aux érections musulmanes. Et ahem comme cette dernière phrase est très très ambigüe, je vais vite passer au cœur du sujet oups oups en avant les enfants.
En fait, ce qui m’intéresse ici n’est pas tant la réaction des citoyens suisses, repoussant tel des Charles Martel de la démocrassie triomphante les envahisseurs musulmans dans de tristes et petits lieux de culte garantis sans minaret, que celle des politiciens et des journalistes, notamment en France.
La réaction des uns et des autres est d’ailleurs à ce point similaire qu’on se demande exactement ce qui les différencie encore : tous les deux âpres à la discussion, volontaires dans la simplification des discours et girouettes commodes toujours dans le sens du vent, de la mode et de ce qu’il faut en penser, vivant finalement directement ou indirectement du fruit de l’impôt, disposant de privilèges taillés sur mesure au fil des ans par de constants combats et manipulations de l’opinion, de plus en plus détachés des réalités de terrain, les uns ne se démarquent plus guère des autres que parce que les premiers écrivent et les seconds parlent. Ou l’inverse.
En substance, donc, nos politiciens et nos journalistes, dans un ensemble en parfaite synchronisation, nous improvisent avec brio une danse millimétrée sur le thème du « Oh, les vilains Suisses n’ont pas voté comme il aurait fallu. »
On croirait revivre le « Non » à l’Europe, en version Zeures Les Plus Sombres, qui devient une litanie un peu pénible à écouter actuellement, usée qu’elle est d’avoir tant servi pour rien.
On remarque ainsi que, pour l’inénarrable Joffrin qui a vraiment oublié, un jour faste, de s’enfoncer profondément un crayon 2HB dans l’œil et persiste donc à s’en servir pour noircir bêtement du papier, si le peuple a voté ainsi, c’est qu’il n’a, sot qu’il est, pas réfléchi :
La peur irraisonnée de l’islam a de nouveau frappé en Europe.
Voyez-vous, eût-il voté contre l’interdiction des minarets, ce même peuple aurait été la démonstration que les intégristes fascistes et autres méchants zélateurs de la discrimination qui fait des taches s’étaient encore trompés, que les Suisses sont des gens posés, sages et tolérants, et tout ça, quoi.
Mais zut de zut, ce con de peuple a voté pour, et immédiatement, c’est parce qu’il a peur, qu’il est irraisonné, et qu’il décide de s’en remettre à la méchante opposition avec des termes comme « frappe », « absurde », « préjugé », « droite-extrême ».
Pour notre Laurent de compèt, nous avons donc 57% (et des brouettes) de petits fachos en Suisse, en gros.
Côté politiciens, c’est évidemment un festival. Comme, en plus, ces vilains Suisses ont eu l’impudence d’enquiquiner Polanski, il sera de toute façon difficile de leur trouver gain de cause. Si Kouchner le pouvait, je pense qu’il aurait déjà déclenché le feu nucléaire histoire de vitrifier un peu tout ça, au motif que la démocratie est un outil trop dangereux pour la laisser aux mains d’un peuple qui fait n’importe quoi dans son coin. Et boum.
Quant à Besson, par exemple, la meilleure façon de ne pas avoir de souci avec un tel débat consiste à ne surtout pas poser la question, et tout ira bien.
Pour ce qui concerne la France, j’aimerais bien qu’on évite ce type de débat, qui ne me paraît pas majeur. Nous devons favoriser en France l’émergence d’un islam de France qui s’intègre dans les valeurs de la République, et le meilleur moyen de parvenir à cela c’est d’éviter les faux débats.
On dirait un carbono-enthousiaste expliquant par le menu pourquoi le consensus existe et comment il faut procéder pour ne pas se poser de questions.
Mais s’il n’y avait que le bruit que faisaient ces impétrants couineurs, ça irait encore (à peu près). Mais en plus du bruit, il y a les odeurs couleurs !
C’est ici que peuvent se glisser quelques captures d’écrans un peu chaudes. Miam.
Dans la catégorie »Jeux De Mots Laids Pour Les Gens Bêtes » , nous avons Libé, avec cette mââgnifique question : les Suisses sont-ils trop démocratiques ? Hein ? C’est vrai ça ! Déjà qu’avec Milka, on les soupçonnait d’être trop mauves, je pense qu’on peut le dire : ils sont trop démocratiques, les zouaves.
Et puis, le petit Suisse manque de pudeur, c’est évident : se poser une telle question, c’est ouvertement salace.
Coquins de Suisses, va.
Côté Le Monde, c’est aussi génial. Nous avons droit à un petit sondage, pas du tout orienté.
(cliquez sur l’image pour l’agrandir un peu)
La question pourrait être: « organiser un référendum sur la construction des minarets, est-ce, selon vous : »
La question est posée ainsi : « organiser un référendum sur la construction des minarets, comme cela s’est fait en Suisse où il a été rejeté par 57% de la population, est-ce, selon vous : »
La question veut dire, en fait : « organiser un référendum sur la construction des minarets, comme cela s’est fait en Suisse où 57% de fascistes se sont violemment drapés dans la discrimination la plus honteuse en rejetant l’ouverture à l’autre, sa diversitude etc, est-ce, selon vous : »
A la limite, on aimerait faire un sondage un peu comme suit : s’abonner à Le Monde alors que ses informations sont massivement orientées, tronquées et partisanes, est-ce selon vous :
- une perte d’argent
- l’occasion de rire une fois par jour et en temps de crise, c’est toujours bon à prendre
- un signe d’irresponsabilité
- sans opinion
Bref.
La démocratie, c’est bien, mais c’est finalement comme les antibiotiques : ce n’est pas pour tout le monde, ce n’est pas tout le temps, et ce n’est pas automatique. Et les médecins qui prescrivent, à savoir les journalistes et les politiciens, savent bien mieux que le peuple ce qui est bon pour lui. Faites leur confiance !
Et penchez-vous en avant.