DE NOTRE BUREAU DE BRUXELLES.
S'en prenant ouvertement au secret bancaire, le commissaire européen à la Fiscalité, Lazlo Kovacs a proposé d'en " éliminer l'usage abusif " en empêchant les Etats membres qui le pratiquent moyennant un système d'imposition à la source - l'Autriche, la Belgique et le Luxembourg - de l'invoquer pour refuser de fournir des informations concernant un contribuable à son pays de résidence si ce dernier en fait la demande.
Avantage compétitif
" Cela n'aura pas d'impact sur les relations qu'entretiennent les autorités nationales et leurs ressortissants ", a pris soin de préciser Lazlo Kovacs. De fait, les trois pays visés pourront continuer de pratiquer le secret bancaire pour leurs propres résidents. Autre bémol : l'échange d'informations ne se fera pas automatiquement, mais uniquement à la demande d'un autre Etat. Il n'empêche. Alors que les négociations pour parvenir aux subtils équilibres de la directive de 2005 sur la fiscalité de l'épargne avaient duré quatorze ans, la Commission s'en prend à un principe dont les banques autrichiennes, belges et luxembourgeoises ont fait un véritable avantage compétitif.
L'Autriche a ainsi averti dès hier qu'elle ne soutiendrait pas la proposition. " Abandonner le secret bancaire seul n'a pas de sens, a indiqué un porte-parole du ministère des Finances. Nous sommes contre une solution unilatérale au détriment de l'Autriche. " Pour lui, elle risquerait de désavantager les banques autrichiennes vis-à-vis de leurs concurrentes des pays voisins de l'Union qui pratiquent aussi le secret bancaire : Suisse, Saint-Marin, Monaco, Andorre et Liechtenstein.
Faire pression
Avec de telles mesures, qu'il espère voir adoptées " avant la fin de l'année " malgré l'unanimité qu'elles requièrent entre Etats membres, Lazlo Kovacs souhaite faire pression sur ces paradis fiscaux installés aux portes de l'Union pour les amener à revoir leur attitude. " La directive n'obligera pas les pays tiers, mais elle renforcera la position de l'Union qui négocie avec certains d'entre eux ", a-t-il indiqué.
Ces projets de directive viennent compléter d'autres propositions formulées à l'automne par la Commission pour élargir à de nouveaux acteurs et produits financiers le champ d'application de la directive de 2005 (" Les Echos " du 14 novembre), dont les lacunes avaient été mises en évidence par la découverte d'une évasion fiscale massive au Liechtenstein début 2008.
Entre-temps, l'affaire Madoff, qui affecte plusieurs fonds d'investissement luxembourgeois, a apporté de l'eau au moulin de ceux qui critiquent, depuis le début de la crise financière, la place luxembourgoise pour son manque de transparence.
Les Echos, 3 février 2009