Alors au tout début de la bête humaine sur terre, les environs de notre patelin furent occupés par diverses civilisations. Celle de "Knovíz" (âge du bronze), de la Tène (âge du fer), par les Celtes (âge du biniou qui grince) et diverses autres cultures issues de la grande migration des peuples (de nombreuses fouilles archéologiques le prouvent). Mais la période qui nous intéresse, c'est celle des fortins (et toilettes) en bois, de vers le XI ème siècle, période d'installation durable des divers peuples en les divers territoires, et début de l'expansion du christianisme chez ces mêmes païens.
Sinon l'origine du nom de "Chabry" est incertaine même en Tchèque. Elle pourrait provenir du vieux slave "chrabr" (guerrier), "chrabrý" (aujourd'hui, vaillant, preux), comme le Polac "Bolesław I Chrobry", ou le moine "Chrabr - Naum" (alphabet glagolitique versus cyrillique, Ohrid, Macédoine... bref, une autre fois). Ce nom pourrait provenir d'un nom propre aujourd'hui disparu, dont l'origine serait identique au nom commun (brave, vaillant, preux...).
Dans le courant du XI ème siècle, l'on construisit la première église sur l'emplacement de l'actuelle, et l'on commença à y enterrer les défunts tout autour (cf. plus loin). Ensuite, entre le XI - XII ème siècle, l'édifice fut remplacé par une rotonde sur laquelle je reviendrai en détail plus loin. Et enfin vers 1180, un troisième édifice de forme rectangulaire allongée terminé en hémicycle remplaça les 2 précédents, mais je reviendrai dessus également. Alors commençons avec la toute première église: tout d'abord 'tention quand on dit église...
Notre 3 ème église donc ressemble à la 1 ère, genre rectangu l'air de 13 x 8 m, terminée par une abside hémicyclique (notez qu'icelle est couverte par un toit séparément du reste du bâtiment). En 1273, le patelin comme l'église seraient passés sous la possession du monastère de "Strahov" (cf. la fameuse bulle pontificale que je n'ai pas retrouvée "Anno Domini MCCLXXIII: papa Gregorius decimus, Episcopus Romanus, suis bullis gratiosis confirmavit et ratificavit..."). Ensuite pas grand chose, sinon qu'un document de 1352 (pas retrouvé) indique que l'église est pas roissiale. Du coup l'on présume que les moines de "Strahov" l'auraient louée pour se faire du pognon, parce qu'en 1397, un privilège (pas retrouvé non plus) de l'ivrogne "Václav IV" confirme la possession du patelin par le monastère. Bref, puis ça devient compliqué. En 1420, les Praguois (hussites) vandalisent et mettent à feu "Strahov", puis confisquent les biens du monastère (et pas que de celui-là) qu'ils vandalisent à souhait également.
Comme déjà mentionné dans mes précédentes publies, la Bohême vaincue fut littéralement pillée jusqu'au dedans de l'os par les vainqueurs. Et parmi ceux-là (vainqueurs), ben y avait l'autre foutre de Wallenstein ("Albrecht Václav Eusebius z Valdštejna").
Tout d'abord le fameux pied de colonne qui se trouve sous le faux plancher en bois de l'église, installé exprès afin que les curieux puissent l'admirer (le pied, cf. mes photos, et remarquez sur le coin droit, en bas, les "griffes"). Alors lorsque les archéologues exhumèrent l'objet, ils présupposèrent qu'il y avait là-dessus une colonne qui devait supporter une tribune en bois disposant d'une entrée distincte (tribune) pour les notables du domaine adjacent (sans doute) à l'église qui pouvaient être fortifiés (domaine + église) par une ceinture de remparts.
Ensuite les carrelages en céramique terràcôté. Comme dit, l'on en découvrit huit dans la rotonde disparue, en terre cuite (terracotta) les carrelages, que les moines apparemment fabriquaient eux-mêmes avant qu'ils ne découvrent que le brassage de la bière est nettement plus excitant et lucratif.
Pis y a les fresques. Alors attention, ce sont des oeuvres majeures en termes d'ancienneté et de conservation. Lorsqu'en 1905, l'on fit les travaux de restauration, l'on découvrit sous les fresques de la coupole absidiale le même motif que celui peint, mais moins beau, plus vieux genre. "Ouah eh, viens voir Machin, les gars ils ont repeint à neuf sur le vieux." Sauf que lorsque Machin mit un oeil sur le vieux, il se rendit compte du délire: les fresques d'origine remontaient à la première moitié du XIII ème siècle. Et c'est bien celles-là que vous pouvez encore voir aujourd'hui, eh oui: un Jésus pantocrator en mandorle (j'ai l'impression de parler Chinois, mais vous trouverez tous ces termes dans wiki). Dans sa main gauche, il tient sa biographie dédicacée (en vente dans toutes les bonnes librairies) portant mention "Ego sum primus et novissimus" (je suis le premier et le dernier...) dont il manque un bon bout (Apocalypse, ch.1), et que sorti du contexte, on pourrait le croire schizophrénique, le Jésus.
En conclusion, j'aimerais encore rajouter que cette église est malheureusement en piteux état par manque de finance, parce que forcément, en temps de crise (mais même sans, la crise), y a plus de pognon pour rien, sinon pour des conneries (cf. la visite du pape, les élections avortées...) ou de l'escroquerie d'ampleurs interstellaires (nos fumiers locaux ne font jamais rien à moitié, c'est une vraie carrière, l'investissement personnel de toute une vie). Alors un petit comité de bénévoles s'emploie à la maintenance, voire à la restauration (quand y a du pognon) de cette église (comme d'autres édifices du patrimoine local) dont l'importance semble aujourd'hui négligeable, mais qui, il y a quelques 800 à 1000 ans de cela, représentait fort certainement le pinacle de l'architecture et de l'art pictural d'alors.