Vous n’avez pas été sans remarquer que l’ordinateur, souvent piloté par un type pas très net et nerveux (l’informe à tics), a pris une place prépondérante dans votre vie et hélas, dans la mienne aussi.
En effet, on vous dit qu’avec cette machine, tout deviendra plus simple et plus rapide. Ne croyez pas les informaticiens ! Vous avez un quotient intellectuel normal, votre compétence professionnelle est reconnue, votre vie sociale et familiale est sans histoire, et vous vous dites que c’est le moment de vous lancer dans l’aventure et de contacter des informaticiens, concepteurs ou vendeurs.
Erreur ! Vous avez tort, votre monde n’est pas le leur.
D’abord, ils ne parlent pas la même langue que vous ! Vous êtes noyés immédiatement sous un flot de termes techniques et totalement hermétiques où, dans le meilleur des cas, vous passez pour un provincial attardé et dans le pire, pour un crétin congénital : DX ou Pentium, mémoire cachée, upgradable, étendue ou même morte (qu’est-ce qu’on peut bien faire avec une mémoire morte ?), DOS ou Windows, ROM et RAM, mégaoctet ou bytes, mouse et keyboard, écran VGA ou SVGA et j’en passe. Complètement affolés, vous ne savez plus quoi choisir. De toute façon, dites-vous bien que dans trois mois, le matériel ‘’Top niveau’’ que vous avez pris en désespoir de cause sera obsolète (démodé dans le langage courant) et naturellement invendable. Une fois équipés, vous croyez que vous avez fait le plus dur.
Nouvelle erreur ! Votre bécane (ordinateur en langage usuel) ne parle pas votre langue maternelle ou alors votre mère était la sœur de Bill Gates. Ensuite, il vous faut ingurgiter un ‘’guide de l’utilisateur’’ épais comme l’Ancien Testament mais beaucoup moins rigolo, qui vous précise que si vos Config.sys ou Autoexec.bat ne sont pas corrects, vous n’avez plus qu’à appuyer sur Escap (échappe en langage normal). Vous êtes bien avancés, mais surtout retenez bien cette touche, c’est celle qui vous servira le plus avec celle de l’arrêt, car un des avantages de l’ordinateur sur l’être humain, c’est qu’on peut l’éteindre quand on en a assez ! Au bout de 5 ou 6 mois, les bases acquises, vous surfez sur vos fichiers et un jour, tout se bloque sans raisons valables. Votre ordinateur, dont on dit que c’est un appareil idiot puisqu’il ne sort que ce qu’on y rentre, a décidé de l’être et refuse de démarrer. Vous faites donc appel au ‘’technicien qui sait’’.
Encore une erreur ! Cet incident mineur provoque des réactions parfois violentes de l’homme de l’art. Si, après avoir tapoté d’un air affairé quelques minutes et vous avoir accusé d’avoir déconfiguré l’arborescence (foutu la m…e en langage ordurier)-ce qui est vrai, mais que vous n’avouerez jamais-, vous l’entendez dire sur un ton protecteur : « C’est très simple, il suffit de…», soyez sur vos gardes ! Il va vous proposer un nouveau hard disk (disque dur en….), un lecteur CD, un modem ou tout autre périphérique comme ils disent, à brancher sur votre micro (à ne pas confondre avec l’espèce de saucisse grillagée tenu à la main par les chanteurs). Si vous achetez du matériel de la même marque et si votre installation n’est pas trop vieille, vous avez une toute petite chance de pouvoir faire fonctionner le tout après quelques loupés. Mais si vous êtes en réseau, dans un univers de marques disparates, d’équipements de tous âges et de tous types, alors les ennuis commencent. Il vous faudra longuement bidouiller, faire de nombreux essais, passer de longues heures à maudire le fabricant qui s’en fout éperdument, pour finir par obtenir un résultat à peu prés satisfaisant.
Une autre éventualité, aussi grave, est qu’il vous dise d’un air soucieux : « C’est peut-être un virus? ». Un virus, c’est simple. C’est quelque chose que personne n’a jamais vu, qui rentre on ne sait pas comment dans vos programmes, qui évolue on ne sait pas pourquoi et qui rend fou votre machine, votre technicien et votre femme, encore que pour cette dernière, il ne soit pas vraiment indispensable !
Il vous faut donc acheter un Anti-virus, dont on vous prévient tout de suite qu’il a de grandes chances de ne pas fonctionner avec votre virus personnel car il faut qu’il soit « compatible ». Plus vous fréquenterez les informaticiens et mieux vous comprendrez à quel point le mot compatible a un sens différent de celui communément admis. Vous avez bien entendu parlé de la guerre fratricide qui divise les systèmes, logiciels et équipements. Mais on avait fini par vous convaincre qu’ils étaient devenus « compatibles ».
Erreur toujours ! Les fanatiques du PC ne sont pas les fondus du Mac. Tous ne jurent que par leurs machines et il n’y a que leurs femmes qui jurent de les foutre par la fenêtre à la première occasion ! Dans les deux cas précédents, tout le monde aura compris que les fondements du système lui-même sont ébranlés, que l’Apocalypse menace et que la fin du monde informatisé n’est pas loin !
Alors soyez patients : rappelez-vous que l’ordinateur fait gagner un temps fou quand ça marche et qu’il faut un temps fou pour en arriver là ! De toute façon, l’informatique, c’est comme la typhoïde : on en meurt ou on reste idiot. Je le sais, je l’ai eue.