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Néocolonialisme & Agrobusiness, à l’abordage !

Publié le 22 mai 2009 par Arsobispo

Ce matin, 22/05/2009, Paris présente une journée estivale. On se croirait au mois d’août ; moins du fait de la météo que de la fuite des parisiens vers la province. C’est très agréable pour tous ceux qui n’ont pas profité du pont que propose invariablement la fête de l’Ascension. Ils peuvent savourer un Paris déserté sous un ciel radieux. Même les touristes semblent moins nombreux que les jours passés. Peut-être ont-il cédé au strass de Cannes comme la classe bling-bling… Tant mieux ! Les rues à moto sont lumineuses et paradoxalement, les usagers semblent se promener, y compris sur les périphériques.

Il y a quelques heures, j’étais fou de rage à l’écoute des commentaires de Marie Colmant dans la matinale de

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. Elle faisait écho à l’interview du chanteur de rap somalien Knaan, qui, ce qu’occultait Marie, parlait moins des pirates somaliens que des raisons pour lesquels ils sont apparus. Il remettait en cause les médias, dont Marie fait partie comme tous les journalistes de la Matinale et plus globalement d’ailleurs de 
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qui ne pense actuellement qu’au strass de Cannes. En effet, tout le monde s’émeut des méfaits de ces pirates. Par contre, qui parle des bateaux usines occidentaux qui pillent les côtes somaliennes ? Là était le propos de Knaan. C’est de cela qu’il fallait parler. Marie l’a oublié. Et je me demande ce qu’est devenu le professionnalisme des journalistes. Si même 
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se met à observer son nombril - Marie, je t’en prie, reprends toi -
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se trouvera un digne successeur. Et de mon côté, j’ajouterai une nouvelle chaîne à la liste déjà longue de celles que je boycotte.

Pour en revenir à cette nouvelle forme de colonisation que pratiquent les investisseurs internationaux, quand donc s’élèvera un véritable débat sur les « petits arrangements » entre gouvernants véreux et multinationales sur le dos des peuples africains ? Si les pécheurs ne tirent que méduses et sacs plastiques de leur filet, si les agriculteurs ne cultivent qu’herbes sèches et ne labourent que de la poussière, la raison est à chercher du côté des contrats passés par leurs dirigeants avec les lobbys de l’agroalimentaire. Et peu importe que les populations locales n’aient que cela comme moyens de subsistance. L’attrait d’une Mercedes, d’une résidence dans une capitale européenne ou d’un compte bien gras en Suisse, justifie tout prurit de la conscience… L’équivalent neurologique du Malox doit sans doute être compris dans le contrat. Le pire est le constat que certains pays agissent en lieu et place de grands groupes privés. Ceux là, agissent afin de nourrir une population à venir, sans tenir compte de la malnutrition des vivants, si tant est que l’on puisse utiliser ce terme pour des morts de faim ! Du coup, les pécheurs du Cameroun, du Maroc, du Sénégal, regardent de leur pirogue, de leur barcasse, la puissante beauté des bateaux usines avec un sentiment d’impuissance et de résignation[1]. Face à cette nouvelle forme de colonisation, aussi meurtrière que celle plus militariste des siècles passés, comment ne pas comprendre ces nouveaux pirates à la kalachnikov ? Ne serait-il pas justifié, au contraire, de pousser les peuples africains à prendre exemple sur les pirates de la Corne d’Afrique et les preneurs d’otages mauritaniens ! Non, bien entendu, d’autant que nos médias vont noyer le poisson - comme s’il en restait - dans l’eau en occultant ces inévitables effets d’une globalisation répugnante en pointant du doigt les agissements souterrains de réseaux islamiques. D’ailleurs, en dehors de certains journaux - de le presse écrite[2] et non TV - qui s’est fendu d’une évocation du rapport “Accaparement des terres ou opportunité de développement ?”, publié par les experts de l’Institut international de l’environnement et du développement (IIED), en collaboration avec le Fonds international de développement agricole (FIDA) et l’Agence pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), toutes deux émanations de l’ONU ?

Au delà des rivages, les pécheurs Camerounais, maliens, malgaches, marocains, sénégalais, vont de plus en plus loin en mer, prennent plus de risques, partent plus longtemps sur leur frêles esquifs, se rabattent sur la pêche d’espèces protégées. Quand ils en trouvent. Puis, ruinés, abandonnent la vie ancestrale pour les bidonvilles des capitales. Le plaisir contemplatif qu’offrent la majesté de l’horizon, les paysages côtiers et les couchers de soleil sur l’océan, ne sera plus qu’un souvenir. Comme tant de choses…

A l’intérieur des terres, les paysans maliens, éthiopiens, tanzaniens, soudanais, malgaches, ghanéens, observent leurs maigres cultures péricliter, faute de terres, ou au mieux, faute d’accès à l’eau. Grâce aux judicieux conseils d’anciens « conseillers » mandatés par les ex-pays tutélaires, peu de constitutions africaines octroient une libre propriété des terres ancestrales. Encore heureux qu’ils en aient le droit d’usage… C’est ce qui est en train de changer ! Ils se joindront alors à leurs compagnons pécheurs dans une main d’œuvre pléthorique offerte aux usines de l’agroalimentaire… Un montage génial. Un projet mené de main de maître. Un véritable chef d’œuvre de stratégie planétaire. Comme quoi, nos grandes écoles savent y faire !

Les experts de l’IIED, du FIDA et de le FAO, n’ayant sans doute qu’une confiance très relative dans les dirigeants africains, préconisent la consultation des populations rurales menacées. C’est vraiment le moins que l’on puisse faire… pour se sentir déchargé de toute responsabilité ! Il est vrai que ces pauvres experts ont déjà tant de soucis avec les islamiques… Cette bonne conscience est d’ailleurs partagée par les états occidentaux, appelant à la solidarité. Ah, la taxe Chirac ! Que je suis fier d’être français. Et ce n’est pas fini. On verra sans doute très prochainement les mirifiques précipités que produiront les éprouvettes de notre Grenelle environnementale… En attendant, le nombre de fonds privés occidentaux ou issus des pays du Golfe augmente sans cesse et les terres agricoles libres deviennent une peau de chagrin.

On s’en fout, c’est en Afrique !


[1] Voir à ce propos le film « les Damnés de la mer » de Rhalib Jawad

[2] Merci à Laetitia Clavreul du journal 

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