Le Rakaposhi, culminant a 7790m, est le 29e sommet au monde, et il est juste au bord de la Karakoram Highway. Un des treks les plus beaux de la region consiste a aller au camp de base a 3500m, et de traverser le large glacier de Minapin jusqu'au camp de base du Diran (7230m) avoisinant, avant de redescendre dans la vallee, a la chaleureuse Diran Guest House a Minapin. Et, bien avises, c'est bien ce que nous avons fait.
Recit des evenements.
Arrives le 25 au soir a Minapin en "taxi" depuis Karimabad (600 Rs), nous nous sommes offerts un festin a base de poulet Gorkon (dans un recipient en terre cuite, le Gorkon, avec des oignons et autres legumes), de tourtes a la viande, de frites et autres patates sautees (pour le plus grand plaisir de Lina en particulier), larges assiettees de riz et autres joyeusetes, avant de sombrer d'un sommeil profond dans le sympathique dortoir dont nous etions les seuls locataires.
Le 26 au matin, large petit dejeuner pour ne pas se laisser trop aller, avant d'envisager les options s'offrant a nous. Le guide de voyage suggere de monter au camp de base en deux jours et de redescendre en un (1500m de denivelee). Et le glacier ? Il est suggere en side-trip de 8 heures aller-retour jusqu'au camp de base du Diran. Mouais... Nous tranchons : ce sera montee directement au camp de base le premier jour, traversee du glacier et redescente par l'autre flanc le second jour. Deux grosses journees en perspective, donc, et les trois heures prevues sur le glacier rendent evidentes a nos yeux de novices la presence d'un guide pour ce passage potentiellement delicat.
Il s'appelle Tarek, il a 22 ans, est etudiant en informatique dans la region, et fait guide pendant ses vacances. A 1000 Rs (1 euro = 80 roupies), ce sera notre guide pour ces deux jours.
Notre ascension ne debute qu'apres 10h30, il faut bien digerer ces 4 omelettes et 7 chapatis au miel... Montee non sans encombres, puisque quelques minutes apres le passage d'un torrent dechaine et d'un groupe de japonais (plus sportifs que ceux qu'on croise a Paris...), nous arrivons jusqu'a un groupe de locaux en train d'amenager le chemin pour le passage futur de jeeps, a coup de dynamite. Ils nous enjoignent de rester un moment a couvert, sous la pluie commencante. Un instant plus tard, il ne s'est toujours rien passer, mais notre guide un peu en avant nous fait signe de la rejoindre, et la...
BAOUM !
L'explosion retentit a 100m en avant, des petites pierres sont projetees dans tous les sens, et notre guide revient ses jambes a son cou... probleme de comprehension ? Rebelote une minute plus tard, et la les ouvriers nous l'assurent, ca ne sautera plus... Mais passons vite, on ne sait jamais...
La montee se poursuit cette fois sans difficulte si ce n'est celle du climat : il pleut une bonne heure, et comme Lina n'a pas de protection pour son sac-a-dos, je dois porter les deux notres sous ma large cape pendant un moment... Une tente-hotel nous fournit un the revigorant a mi-parcours, et nous atteignons finalement notre but un peu plus de cinq heures apres notre depart.
Pedro et Christophe ont lachement abandonne leur tente a l'hotel en bas, sacrifiant 150 Rs de plus pour la location d'une tente en echange d'un soulagement de 2,9 kg... facile... Car la tente au Rakaposhi Base Camp n'est pas un hotel, il n'y a pas de petits cabanons comme dans les coins plus touristiques, mais par contre les businessmen locaux peuvent louer tentes, duvets, matelas, etc. Et la tente qui echoit a nos deux faineants n'est pas du bas de gamme : une North Face avec des arceaux et des sardines partout, adaptee a des nuits extremes sur glacier ou a plus de 6000m. Drole d'investissement ? Bien au contraire ! Cette tente appartenait a l'origine (d'apres la petite histoire de nos hotes) a une expedition allemande de 4 personnes, partie tenter d'acceder au sommet du Diran, dont la face tres reguliere et pyramidale genere en fait un micro-climat et de fortes bourrasques, ainsi que de facheuses avalanches, l'une d'entre elles ayant mis une fin prematuree a l'expedition allemande. Flairant l'aubaine (ou participant au "sauvetage"?), quelques bergers et guides locaux sont montes recuperer la tente des malheureux, bien plus utile maintenant qu'ensevelie sur les flancs de la montange tueuse.
150 Rs de plus pour une nuit tellement chargee de sens (?), ca ne se refusait pas... Le repas a 250 Rs par personne, par contre, etait loin d'etre donne. Mais avec des rations de riz et de pommes de terre a volonte, c'est passe un peu mieux...
Nous voila donc d'attaque le lendemain 7h apres s'etre gaves de Chapati (galettes de farine, le pain local), d'attaque pour entamer la traversee du glacier. Nous ne l'atteignons en fait qu'a 8h, apres une descente penible de la grande moraine protegeant l'alpage ou reside le camp de base. Et la, c'est un autre monde qui s'ouvre a nous. C'est tout blanc, tout gele, ca glisse, il faut faire attention aux crevasses, des ruisseaux se promenent a la surface gelee, le paysage est vraiment fabuleux !
Ce n'est qu'apres trois heures de marche delicate, dont une bonne moitie ou Lina peu confiante etait accrochee au guide, que nous rejoignons le bord oppose de la vallee. Le camp de base du Diran est tout proche, a peine plus haut, mais y aller apporte peu. Une montee difficile tout droit dans la pente nous donne un peu de hauteur, et surtout nous offre un des paysages les plus magnifiques de l'ensemble de notre voyage : du Diran au Rakaposhi, rien ne passe sous les 5600m, tout n'est que neige, glace et volupte. La pyramide du Diran trone majestueusement a gauche, et le sommet du Rakaposhi se cache de notre regard derriere une robe de nuages argentes. Il est seulement 10h, mais nous sommes deja cuits...
Une demi-heure de repos (sommeil pour Lina), et une heure et demie a flanc de montagne nous amenent a 12h au debut de la redescente, laquelle durera 4h : nous sommes au fond de la vallee, et il y a bien 1700m. Nous arrivons epuises mais ravis a la guest house, ou nous attend un repas memorable, ayany motive les troupes depuis de longues heures...