Prix Fémina et Prix Fnac 2004
Editions de l'Olivier, 2004
Il y a très longtemps que l'on me dit des choses élogieuses sur l'oeuvre de Jean-Paul Dubois. Pourtant, je n'avais encore ouvert aucun de ses
livres. C'est désormais chose faite et quelle bonne surprise ! J'ai donc lu l'oeuvre qui l'a consacré autant chez les critiques que dans le public.
Il s'agit d'une formidable saga familiale qui relate quarante ans d'Histoire politique et sociale française entre l'avènement de la cinquième République et le deuxième mandat de Jacques Chirac.
Émergence de la société de consommation, des Trente Glorieuses, euphorie économique puis désillusions et tragédies.
Tout cela est raconté à travers l'histoire d'un français moyen, Paul Blick et de sa famille, sur un ton tragi-comique. Études de sociologie non commencées ou non terminées en mai 68, petits
boulots, mariage avec une fille de famille, père ou foyer....
Itinéraire d'un homme plus que moyen, un homme qui, faute de s'engager, cultive son jardin, et photographie les forêts et les insectes. Plutôt un anti-héros bien sympathique qui incarne la
défaite française, la désillusion. Le destin de l'entreprise de piscines de sa belle-famille symbolise cette Histoire française ; plein essor sous les Trente Glorieuses puis dégraissage massif
dans les années 80. Boom de la société de consommation et crise boursière soudaine.
La vie des gens est comme l'économie, nous semble nous dire Dubois. Illusions, richesses qui ne tiennent qu'à un fil.
L'arrière-plan très pessimiste du livre laisse toutefois place à une narration très humoristique, sous le signe de la comédie. Les fous rires sont nombreux, les souvenirs hilarants resteront
nombreux : la palme revient au copain d'enfance de Paul, David Rochas, qui n'hésite pas à exercer ses prouesses sexuelles sur le rôti maternel dominical !!! Ou encore la mère de Paul,
mitterrandienne convaincue, qui, au soir de sa vie, rêve que le vénéré président vient s'allonger nu à côté d'elle et qu'elle ne refuse à lui car il a les pieds froids !
Conflits entre une femme entrepreneuse vouant un culte à Adam Smith et un mari aux vieux réflexes gauchistes, révélations d'une amie sur ses incartades amoureuses avec un rabbin, épopée du
photographe mondial des arbres contacté par Mitterrand pour le portraiturer devant les arbres du Morvan...L'histoire va à cent à l'heure, on s'identifie vraiment aux personnages.
Le ton comique cache un arrière plan très pessimiste et tragique. De très beaux passages sur la solitude et la perte des êtres chers au fil de la vie.
Assurément un très beau livre qui reste dans les mémoires.