Emmanuel Martin – Le 23 novembre 2009. Le désormais célèbre Climate Gate a ravivé le débat sur l’origine des changements climatiques et pose la question de la manière dont est parfois conduite la science : de quoi inspirer les décideurs à Copenhague.
La science est un processus d’accumulation de la connaissance par la critique : des théories ou des hypothèses sont proposées et examinées (du point de vue de leur cohérence interne et de leur adéquation avec les observations). Les théories mauvaises sont écartées ou améliorées : la science « avance » dans un processus d’essai-erreur-correction. Il existe alors à tout moment du processus scientifique deux catégories de débats. Ceux qui sont réglés parce que toutes les preuves ont été apportées pour corroborer les hypothèses ou théories dominantes et que la critique a cessé (la Terre n’est pas plate, et aucun scientifique ne revient sur cette question). Ceux qui sont encore ouverts et nécessitent que le processus critique continue.
Le débat sur le réchauffement climatique relève de la deuxième catégorie : la climatologie est d’abord une science du complexe qui est loin d’avoir intégré tous les déterminants de l’évolution du climat (comme les nuages par exemple). Ensuite, il existe un débat entre scientifiques respectables sur la question des causes du réchauffement, avec, il est vrai, une minorité (estimant que l’activité solaire est un facteur majeur de l’évolution du climat) face à une majorité. Le débat est d’ailleurs tel que l’Académie française des sciences la semaine dernière s’est refusée à trancher tant les divergences de ses membres étaient importantes.
Ici, le concept de « consensus scientifique » est problématique. Veut-il dire vérité ? Celle-ci ne serait alors plus déterminée à l’aune de preuves et de falsification de théories, mais de ce que « croit » la majorité des scientifiques à un moment t. Dans les années 1950 le consensus était qu’il n’y avait pas de dérive des continents… Vingt ans plus tard c’était l’inverse, parce que de nouvelles preuves avaient été apportées. Les difficultés à trouver des preuves et à apporter la critique, ainsi que parfois l’utilisation commune de données de mauvaise qualité peuvent expliquer le consensus erroné. Le consensus s’explique aussi par des raisons sociologiques : effets de réseau, « reproduction » par la formation même des jeunes scientifiques, non exposition de ces derniers aux théories minoritaires, intérêts économiques (en termes de financements de la recherche) à soutenir le consensus. D’où parfois un affaiblissement du processus critique de la science et l’amplification « non-scientifique » du consensus.
La climatologie est une science incomplète et il y a débat sur la question du réchauffement : il est donc illégitime, voire anti-scientifique, de proclamer que la question est réglée. Or c’est ce que disent certains chercheurs affiliés au GIEC, comme Thomas Stocker, qui qualifie les sceptiques de l’origine anthropique du réchauffement de « négateurs ». Pour Raymond Pierrehumbert les sceptiques de la courbe de Mann sont les « Chevaliers de l’ordre de la Terre plate ». Des journalistes ont comparé les sceptiques à une espèce de religieux. Voilà donc qu’on inverse les rôles : alors que le scepticisme est la qualité première en sciences, les sceptiques (au sein d’une science incomplète et en débat) seraient désormais … des dogmatiques.
Il y a plus grave. Les emails, récemment dévoilés, entre des membres du Climatic Research Unit, notamment son directeur Phil Jones, et, entre autres, Michael Mann (auteur de la courbe terrifiante en forme de crosse de hockey) démontrent que ces « climato-alarmistes » se sont livrés à des fraudes scientifiques : manipulation de données, refus de dévoiler des données, tentatives de corruption des responsables de la loi sur la liberté de l’information britannique, pressions sur des pairs et des revues publiant des thèses opposées... Point important : ces scientifiques contrôlaient les données utilisées par les scientifiques du monde entier. M. Mann est depuis peu sous le coup d’une enquête de son université (Pennsylviana State University, USA) et des scientifiques du GIEC ont demandé son éviction du GIEC.
Enfin, la thèse du GIEC pose que le CO2 produit par l’activité humaine entraine un réchauffement climatique par l’effet « serre » de ce gaz. La concentration de C02 dans l’atmosphère est passée d'environ 270 à 387 ppm (partie par million) en un siècle. Le réchauffement au cours du XX° siècle est de l’ordre de 0,74°C. Cela suffit-il à en tirer une causalité ? Premièrement les mesures du niveau de CO2 et de température depuis des milliers d’années, issues des carottes glaciaires, indiquent que les variations de CO2 suivent les variations de températures : un sens de causalité inverse à celui du GIEC. Il est possible que la causalité soit inversée aujourd’hui du fait d'un effet de seuil dans la concentration de CO2. Mais alors deuxièmement, pourquoi le réchauffement climatique annoncé se fait attendre depuis une décennie puisque les températures se sont stabilisées alors que la concentration de CO2 a augmenté (387 ppm aujourdh'ui) ? Les dix dernières années ne confirment donc pas la théorie du GIEC.
Nous sommes donc en présence (1) d’un débat scientifique réel non clos sur le réchauffement ; (2) de fraude scientifique de la part de climato-alarmistes du GIEC, de premier plan et contrôlant les données (3) d’une théorie du GIEC qui n’est pas confirmée par les observations. La raison porte à conclure qu’il est trop tôt pour prendre, au niveau national et international, des mesures fondées sur un soit-disant consensus scientifique, qui détournent des ressources de problèmes écologiques réels et auront des conséquences développementales considérables. Laissons faire la science.
Emmanuel Martin est analyste sur UnMondeLibre.org.