Flux et reflux de cette douleur ce soir. Lorsque mon vagin brûle, je suis envahie par cette brûlure. Mon cerveau est constamment sollicité, il est pénible de vaquer aux occupations quotidiennes. Avoir du plaisir est moins plaisant. Manger est moins bon, parler doucement à son enfant et l'écouter avec une certaine ouverture d'esprit est moins facile. Je fais les choses rapidement, en me déplaçant vite. Lorsque je marche vite, je sens moins la douleur. Je porte des vêtements informes qui laissent aérer la zone: je ne supporte plus les vêtements serrés.
J'essaie d'occulter la douleur mais il y a une partie de moi qui se demande:
"Pourquoi ai-je aussi mal, qu'est-ce qui se passe dans ce vagin, ce n'est pas normal, il ne peut pas ne pas y avoir de cause, le médicament doit avoir commencé à faire son effet, je savais que ça ne donnerait rien, la prise de Fluconazole et l'autre truc à insérer dans le vagin dont je ne peux même pas me rappeler le nom a certainement bousillé ma flore ou je ne sais trop quoi comme cela a déjà fait dans le passé, pourquoi ai-je fait confiance à ce docteur méprisant qui a posé son diagnostic en visualisant la zone durant trois minuscules secondes, etc."
N'est-il pas lisse et rose, ce vagin, capable d'effectuer ce qu'un vagin doit faire naturellement: garder un taux d'acidité stable, excréter les petits déchets microscopiques, se garder dans un état d'humidité favorable, sécréter à l'aide de toutes ces glandes plus spécialisées les unes que les autres les substances mystérieuses permettant la reproduction, comme le glissement de ce sperme vers le tréfonds de mes entrailles, l'écoulement naturel du sang.
Aujourd'hui, je suis allée à la librairie avec mon homme. Nous avons regardé un livre de photographies d'art extrêmement révélatrices. Très excitant. Nous sommes revenus en hâte à la maison. Je lui ai dis: "Tu sais, j'ai envie de baiser mais on peut oublier la pénétration même si ça me fait tellement chier de ne pas le faire".
-On fera autre chose.
Alors, on a fait autre chose.
Je me sens diminuée, pas tout à fait femme. Je ressens avec tristesse l'impossibilité de prendre corps avec mon désir pour l'autre.
Et je boude mon plaisir. Comment en effet puis-je jouir sans arrière-pensée lorsque je sais que les orgasmes envolés, finis, il ne restera que la douleur.