Il est temps de faire un petit bilan politique sur un mois de novembre qui s’achève en fanfare. Pour un tel inventaire, on peut toujours se focaliser sur les rebondissements climatiques, la vie tourmentée de ce Parti Connu Un Jour Sous Le Nom de Socialiste, l’état de progression de la grippe A, ou les tristes gesticulations d’un gouvernement qui peine à détourner les yeux des Français de la crise G (comme générale). Pour ce billet, je choisirai cependant un angle différent, et un peu inquiétant : les secrets de la République.
De tous temps, la République et, avant même, la Royauté, ont cultivé l’art du secret pour bien des affaires, et, de rumeurs en supputations, de complots en affaires louches, il a toujours régné un parfum de non-dits et de soufre sur les plus hautes sphères de l’Etat français.
C’est comme ça, dit-on : nos gouvernants savent des choses que le bon peuple ne doit pas savoir, ou pas tout de suite, histoire de pouvoir faire avancer ses petits travaux sereinement. Parfois, l’hypothèse veut que c’est dans l’intérêt collectif que des secrets d’état existent.
Parfois, on se demande.
Et si l’on en reste à cet aspect, en se concentrant sur le mois de novembre seulement, on est tout de même impressionné par le nombre étrangement élevé d’affaires dans lequel l’Etat français, ou Sarkozy et son gouvernement, son mêlés de près ou de très près.
Certaines ne sont pas du fait direct de l’actuel président, mais le calendrier, facétieux, les fait ressortir maintenant et s’ajouter à une liste déjà conséquente.
D’autres, en revanches, sont bel et bien directement liées à la personne de Nicolas Sarkozy, soit en tant que Ministre, soit en tant que Président.
Sur Sarkofrance, on trouvera quelques unes de ces affaires qui virent au scandale. On peut en ajouter d’autres, toujours concentrées sur le mois de novembre ; si l’on regarde dans l’ordre chronologique inverse, on découvre ceci :
- 28/11 : l’affaire Coupat et l’hypothétique terrorisme d’état, qui ressemble de plus en plus à de la pure manipulation policière, avec fabrications de preuves et témoignages douteux.
- 27/11 : il est probable qu’on ne saura jamais exactement ce qui a coulé le Bugaled Breizh, mais il n’en reste pas moins que de nombreuses ombres restent sur une affaire à laquelle la Marine semble bien en peine d’échapper. L’enquête semble vouloir avancer, cependant.
- 26/11 : saperlipopette, les sondages élyséens et les rondouillettes factures qui les accompagnaient ne mériteront définitivement pas d’enquêtes alors qu’à coup sûr, elles auraient révélé d’intéressants dessous de notre vie politique. Le peuple n’est pas mûr ?
- 25/11 : décidément, on n’est pas encore au bout des histoires de rétro-commissions. On n’a jamais pu éclaircir complètement les malversations liées aux frégates taïwanaises, le Karachigate promet d’être lui aussi un épais maquis imprenable. Pourtant, des témoins existent et impliquent directement des anciens ministres … et Sarkozy lui-même. Côté enquête et médias, ça patine…
- 21/11 : si, pour les sondages, le peuple va avoir du mal à encaisser la vérité, pour Tibhirine, on commence à envisager un début d’éclaircissements. Notons, là encore, que la présidence n’est pas directement mouillée.
- 12/11 : l’Angolagate défraie la chronique. On sent le chafouin Pasqua, yeux mi-clos mais esprit vif et griffes sorties, prêt à révéler de gros secrets. On sent aussi que ses « révélations » ne sont, en réalité, qu’un avertissement : « Je suis prêt à tout déballer si on me lâche. » Bizarrement, depuis ces révélations que la presse a rapidement qualifiées de bidon, c’est … le calme plat. Pourtant, là encore, on sent que l’implication des plus hautes personnalités de la République est en jeu.
- 4/11 : le soufflé Clearstream retombe petit à petit alors que les responsabilités semblent se diluer au fur et à mesure que la presse s’y intéresse moins. Là encore, une affaire qui implique Sarkozy n’ira probablement plus très loin.
Ici, nous avons sept points, mais je pense qu’on pourrait en trouver encore quelques uns. Notez la bonne corrélation inverse entre l’espoir d’avoir un jour des réponses claires et l’implication supposée du Président ou de l’Etat Français.
On se souviendra, un sourire cynique au coin des lèvres ou une larme de tristesse à l’œil, c’est selon, du programme du candidat à la présidentielle, qui disait, notamment : « Je veux une république irréprochable« .
Au fur et à mesure que les affaires s’accumulent, cependant, cette République irréprochable ressemble de plus en plus à une utopie, un but inaccessible. Cette vidéo, en somme, prend déjà les couleurs sépias d’un vieux roman photo des années 70 trop exposé à la lumière et au temps qui passe…
Les connivences, les petits arrangements entre amis se découvrent petit à petit, et tout est fait pour que les affaires continuent, discrètement ou pas… Tant que l’argent rentre (peu importe d’où il vient, d’ailleurs), tant que le pouvoir est conservé, tant que les journalistes, de plus en plus achetés à coup de subventions, d’avantages et de petits fours diplomatiques, se tiennent cois, tout va bien.
Oh… Il y a bien sûr internet et les blogs. Ce délicat problème sera bientôt réglé.
Et pour les affaires en cours, il suffira à Sarkozy, de respirer un grand coup en espérant que ça va passer …