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Amours estivales - 10. prague : vysehrad

Publié le 28 novembre 2009 par Rl1948


   La logique, géographique, eût voulu qu'après notre déambulation dans le quartier de Josephov, au nord du centre historique de Prague, entamée le 31 octobre et qui s'est terminée samedi dernier par la visite de ce si particulier cimetière juif vieux d'un demi-millénaire, nous nous dirigions, vous et moi, ami lecteur, vers Mala Strana, le "Petit Côté", sur la rive gauche de la Vltava.
   Mais c'en sera une tout autre, thématique celle-là, qui aujourd'hui guidera nos pas vers l'extrémité opposée de la ville, plus au sud encore que Ginger et Fred, dans ce quartier quasiment de banlieue : Vysehrad, le "Château des hauteurs".
     Certes, ce n'est pas le bâtiment d'une conception cubique tout à fait particulière croisé sur notre route qui retiendra le plus notre attention ce matin.
AMOURS ESTIVALES - 10. PRAGUE : VYSEHRAD
   Nous passerons simplement devant - parce que "recommandé" par les guides touristiques.... Ah, bon ? -, avant de grimper sur l'éperon rocheux qui surplombe la rive droite de la Vltava,
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puis, tout de suite nous rendre dans un autre lieu de la mémoire tchèque que constitue le petit cimetière national : voilà, vous l'aurez compris, le fil d'Ariane autorisant un lien entre l'article de samedi dernier et celui-ci.  
   Il y a, au Musée d'Orsay, à Paris, exposée en la salle 59 du niveau médian, une toile symboliste du peintre pragois, disciple de Seurat et précurseur de Klimt, Karel Vitezlav Masek (1865-1927) intitulée la Prophétesse Libuse, du nom de cette princesse mythique tchèque qui, au VIIIème siècle de notre ère, aurait prédit depuis son château fort de Vysehrad la fondation et la gloire future de la ville de Prague. Ville qui, de nos jours, s'étend véritablement entre cette colline et celle de Hradcany, où nous nous rendrons très bientôt  pour constater que sur chacune, en effet, le pouvoir en place, en des périodes différentes  évidemment, installa le siège fortifié de sa puissance dominatrice.
   Ici, à Vysehrad, il subsiste des murs qui firent partie des fortifications de l'enceinte castrale,
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mais aussi, visibles de n'importe quel endroit de la capitale, les tours jumelles de l'église néo-gothique Saints-Pierre-et-Paul
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avec sa porte centrale si caractéristique.
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   Mais si Pragois, le plus souvent, et touristes, occasionnellement, prennent la peine de monter jusque là, ce peut être certes pour y trouver une sorte de paix propice à oublier les tracasseries de la ville, - nous y vîmes nombre d'autochtones mollement étendus sur l'herbe des parcs, en train de prendre le soleil -, mais c'est à mon sens surtout pour visiter, au pied de l'église, le cimetière national.
   Fort peu étendue si j'en appelle à la seule notion de superficie, mais extrêmement concentrée si je n'envisage que l'aspect "célébrités" tchèques, cette nécropole que les autorités voulurent en ce lieu dans la décennie 1860 et que je compare au célèbre cimetière du Père-Lachaise, dans le XXème arrondissement de Paris, constitue à elle seule une encyclopédie de quelque six cents noms parmi les plus prestigieux  considérés comme représentatifs de l'ensemble de la culture autochtone : compositeurs, chefs d'orchestre, peintres, romanciers, poètes, hommes de théâtre, tous, peu ou prou, ont contribué par leur oeuvre à porter la  sensibilité tchèque à son niveau le plus haut, à offrir semble-t-il, volontairement ou non, une sorte d'aura internationale à leur patrie.
     Pourquoi n'en épinglerai-je aujourd'hui que deux ?
   Dans un premier temps, parce qu'incontestablement ils sont  d'immenses compositeurs : Antonin Dvorak et Bedrich Smetana. Peut-être aussi parce que leur monument funéraire respectif se situe aux antipodes l'un de l'autre : celui de Dvorak, mémorial imposant, grandiloquent, parfaitement typé "Art Nouveau"
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et celui, bien plus réservé, plus modeste, qui ne pouvait évidemment que m'interpeller - une sorte d'obélisque égyptien ! ? -, de Smetana
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     Peut-être aussi, et c'est avec cette particularité reproduite en des centaines d'exemplaires ici que je  compte terminer cette visite avec vous, ami lecteur, parce qu'il présente, comme sur la majorité des autres pierres tombales, cette façon hors du commun d'afficher les dates de naissance et de décès :
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le jour et le mois sont en effet inscrits verticalement, un peu comme une fraction mathématique, au milieu de la date fournissant l'année.
     Terminer cette visite ?, vous étonnerez-vous ; pas avant de nous avoir proposé, dans ce Panthéon national, la tombe de Kafka, la tombe du plus grand romancier tchèque dont une statue hommage, vous nous l'aviez montrée, a été érigée tout à côté de la synagogue espagnole !
     Il existe bien en effet, ami lecteur, à Vysehrad, un tombeau gravé à ce nom ;  toutefois, ne vous méprenez pas comme ici beaucoup de touristes non avertis le font : il ne s'agit pas du Kafka du "Procès" et de la "Métamorphose", il ne s'agit pas de Franz mais de Bohumil, un sculpteur portant le même patronyme à qui l'on doit, entre autres créations, la plus grande statue équestre existant au monde, installée
sur la colline de Vitkov.

   Et donc, Franz ?, insisterez-vous ...
   Sa tombe se trouve, notamment avec celle de Jan Palach, le jeune étudiant qui, le 16 janvier 1969, s'immola par le feu, place Venceslas sur les marches du Musée national, en signe de protestation contre l'invasion de la Tchécolovaquie, quelques mois plus tôt, par les troupes réunies du Pacte de Varsovie, dans le nouveau cimetière juif de Prague-Orsany aménagé pour pallier l'exiguïté de celui que nous avons arpenté samedi dernier.
   Mais là, je n'ai pas envisagé de me rendre ...

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