Bourgogne terroir, Bourgogne creuset de l’Histoire, Bourgogne rurale... ces images sonnent agréablement à nos oreilles. Pourtant cette région-lumière est désormais sortie d’une ruralité traditionnelle. La Bourgogne d’hier à aujourd’hui, de l’âge de la bouse à celui de l’I Phone ?
Le Train à Grande Vitesse a sorti la région de l’ornière, qui se vit et se pense désormais comme le nouvel eldorado pour bobos parisiens stressés. A deux heures du périphérique, elle offre au citadin pâlot un cadre d’exception : une terre jaune et ocre, une lumière exceptionnelle, des feuillages flamboyants en cet automne hivernal.
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Mais ce n’est pas tout, la Bourgogne est aussi une terre de haute gastronomie. Et manger en Bourgogne c’est d’abord trouver la gargotte; pour nous ce sera “Le Terroir”.Les petits carreaux aux fenêtres sont recouverts d’une crasse graisseuse de bonne augure. De l’extérieur, rien ne filtre si ce n’est l’odeur de viande faisandée.
A l’intérieur, ce qui frappe c’est l’épaisseur du décor: le plafond bas est traversé d’énormes poutres, les murs sont recouverts de lourdes tapisseries représentant des scènes de chasse, la table est en chêne massif, la porcelaine rustique… Seuls les verres en cristal se distinguent par leur éclat dans la pénombre qui nous enveloppe. Et puis cet air dense, épais, rance qui vous prend à la gorge… La soif finit par s’inviter à table. Quand soudain, surgi de nulle part, à la lueur d’une bougie, apparaît la face fantômatique et boutonneuse de Michel N’Guyen, valet de Santenay, qui nous annonce de sa voix haut perchée et avec des postillons pleins la bouche: “Messieurs dames, la carte !”
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Rien n’aurait pu présager l’apparition de cet ange. En effet, Michel N’Guyen aurait dû passer sa vie à pêcher des poissons dans la Baie de Hạ Long, au Vietnam. Orphelin de père et de mère, il a connu une enfance fragile. Recueilli par une touriste française en 1982 dans un orphelinat, il reçoit une éducation de fer. Fourchette à gauche, torchon blanc sur l’avant bras droit, des-s’il-vous-plait-en-veux-tu-en-voilà, Michel devient un serveur de haut-standing. Formé à la dure dans un bar PMU de Beaunes, il devint un vrai bourguignon, spécialiste des œufs en Meurette.
Symbole de l’ouverture de la Burgundy sur le monde, Michel se sent investi d’une mission. Ouvrir son âme aux touristes parisiens. Mais, hélas. Trois fois hélas. Pour oublier de son pauvre destin, Michel vide les bouteilles laissées par les clients. Puligny-Montrachet, Aloxe-Corton, Pommard… rien ne va plus, Michel est un vrai trou. Une haleine de phoque, des pets malodorants, des erreurs dans les commandes, Michel n’est plus ce qu’il était.
Pour se raccrocher à la vie, Michel s’est acheté un Iphone. Il noie son chagrin dans l’inutile et le futile. Grâce à l’application “Postillon”, Michel est devenu un expert en “Postillon-H1N1″. Ses postillons sont de plus en plus gros, de plus en plus puissant. De quoi contaminer toute notre belle table de convives. Vous reprendrez bien un peu de H1N1 avec votre Coq au vin ?
François, Frédéric et Pierre