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Le foie gras, sa gelée et sa garniture ouf face à un monde incrédule

Par Estebe

Bien les bonjours, les omnivores rieurs

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On attaque ce billet follement gourmand, pétillant et inspiré, tout en soupesant l’inutilité de l’entreprise.
Il est ainsi probable que 32% des lecteurs vont zapper d’emblée en découvrant la présence de foie gras dans cette prose. Une affaire d’éthique, de gavage inhumain, et tout ça. Moins 32%, donc.
Environ 27, 4% des visiteurs décrocheront ensuite en apercevant la gelée, qui nappe si gracieusement le foie gras. Il y a plein de gens qui haïssent la gelée. Une affaire de goût, de choc traumatique enfantin, et tout ça. Moins 27, 4%, donc.
Il est statistiquement prouvé que 43% des gourmands quitteront aussi le navire au simple mot «topinambour». Injustement réputée triste, pétogène et sournoise, la racine n’a pas que des potes. Une histoire d’a priori, de souvenirs douloureux des années de guerre, et tout ça. Moins 43%, donc.
Un peu moins de 19% du lectorat (18, 6% sans doute) s’en iront encore cliquer ailleurs à la simple mention des cranberries, ou canneberges en VO, fruits rouges et secs d’origine lointaine, considérés - à tort ou à raison - comme un pur produit de la branchitude culinaire contemporaine. Une affaire d’humeur, de défiance naturelle face aux diktats de la mode, et tout ça. Moins 18, 6%, donc.
Il n’est pas saugrenu de penser enfin que l’on perdra encore un bon paquet de convives (9, 2%), dégoûtés par le mariage de ces divers ingrédients. Une affaire d’inclinaison intime, d’appétit, et tout ça. Moins 9, 2%, donc.

Un petit boulot sur la calculette. Tap tap tap. Résultat des courses? Moins 130, 7% de lecteurs.

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Ce qui ne fait plus grand monde. Nous voilà tout seul en cuisine. On peut enfiler un monokini, tirer la langue, mettre un disque d’AC/DC à fond les manettes et se rouler parterre en disant des choses vraiment cochonnes avec la bouche.
Bref, pour se bricoler quatre coupelles de foie gras en gelée de vin doux, poêlée de topinambours et canneberges, entrée exquise à engloutir à la cuillère et sans chichi, il vous faut quatre coupes très jolies, 100 grammes de foie mi-cuit, deux topinambours, deux décis d’un vin liquoreux voluptueux mais pas raplapla (visez Jurançon sur la carte), quatre feuilles de gélatine, plus une poignée de cranberries.

Au fond de chaque coupe
, travaillez à la fourchette un quart du foie gras, pour l’attendrir, avec une pincée de fleur de sel et un tour de moulin à poivre. Aplanissez joliment.
Dans une casserole, chauffez puis faites flambez le vin, ajoutez quatre feuilles de gélatine. Laissez refroidir. Puis nappez le foie gras. Expédiez les coupelles au frigo, pour que se raidisse la gelée.
Pendant ce temps, épluchez et taillez les topinambours en minicubes. Détaillez les canneberges en deux, ou trois selon inspiration. Poêlez à feu doux le tout dans une noisette de beurre avec une pincée de cannelle, sel et poivre. Pas trop. Le topi doit demeurer croquant à cœur. Voui, Madame.
Sortez les calices de leur glaciale captivité, parsemez de topinambours et cranberies. Puis servez sitôt la tablée. Tablée qui s’est mystérieusement vidée à l’énoncé de la mise en bouche.
Sifflez enfin, la bouteille de Côte du Jura de chez les Macle, remontée de la cave pour accompagner le machin susdécrit. Seul, en monokini, en refaisant le match sur la calculette.

Adios

NB: S’il reste des auditeurs derrière le poste, ci-joint un croquis préparatoire, griffonné sur le coin de la gazinière par l’artiste d’une main sûre et inspirée.

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