Cette image de notre admirable et magnifique président m'est parvenue par un lien de Monsieur Kaplan sur Twitter. Il comparait alors notre splendide et extraordinaire président à Chantal Goya imitant les oreilles de lapin - ce qui consisterait à le rabaisser grandement. Que nenni ! dus-je dire en moins de 140 signes. Il se demande alors si de Gaulle, Pompidou, Giscard (sans d'Estaing), Mitterrand, Chirac auraient pu commettre le même geste. Je réponds ici non pour les trois premiers : ils sont tous morts* avant l'apparition du signe aux USA. Le quatrième aimait beaucoup Dallas, mais on ne voit pas ce signe dans cette série texanne, et le cinquième ne se repasse plus que de vieux John Ford et Nicholas Ray.
Il s'agit en réalité des guillemets gestuels étatsuniens que l'on peut observer dans le moindre feuilleton télévisuel venant d'outre flaque et qui sont décrits dans cette page. Je dois dire que cela devenait irritant dans des séries comme Ally McBeal ou Friends en disant "Je veux dire exactement", "Je veux dire seulement", "Je veux dire plus précisément". Il fallait surligner chaque propos considéré comme essentiel afin qu'il n'y ait pas d'équivoque et le résultat se révélait comique après la lassitude du spectateur devant ce nouveau langage des signes. Comme l'emphase est le registre préféré de notre faramineux et formidable président, il ne faut pas s'étonner de leur emploi ici. Notons qu'il y a des variantes avec un ou deux doigts, mais que notre président si sage et si érudit a adopté les quotation marks comme single quote et non comme straight quotation marks. Ce qui montre son niveau d'anglais, puisqu'il connaît l'emploi de l'apostrophe simple dans cette langue barbare.
Ce signe est nouveau en français européen, il est né néanmoins il y a à peine trente ans aux Etats-Unis dans la côte Est, mais notre merveilleux et fabuleux président est à l'affût des moindres nouveautés présentes à la télévision (de préférence tihèfouane) qui diffuse surtout des feuilletons ricains. Alors, comment être résolument moderne et paraître comme un nouveau Kennedy, sinon en adoptant un code gestuel en vigueur dans les programmes industriels que regarde tout le monde ? Cependant, notre fantastique et miraculeux président ne s'est pas aperçu que le code gestuel était employé aussi par dérision dans les feuilletons d'outre Atlantique : les tics de la Nouvelle Angleterre sont raillés aux Etats-Unis mêmes et lorsque les Simpson s'en emparent cela devient un jeu, puisque ces bouseux de Springfield (dont l'Etat reste inconnu jusqu'à cette date) ne sont pas censés avoir intégré le nouveau code des élites de ce pays. Qu'il y ait une ironie, une autodérision et une sorte de running gag n'est pas venu à l'esprit du nouveau personnage des Simpson. C'est dommage pour celui qui se prétend lecteur de Stendhal ou spectateur de Chaplin...
* Que l'on ne me dise pas que Giscard (d'Estaing) n'est pas encore mort, je lis les journaux et je ne peux croire qu'un ancien président se répande aussi stupidement dans des romans grotesques. C'est un imposteur qui signe à sa place.