Après une cure de films coréens, plusieurs envies m’assaillent. Si faire des nuits plus longues que cinq heures est sans hésitation l’une d’entre elles, rattraper ce qui est sorti pendant ma parenthèse enchantée demeure incontournable. Pendant ces deux semaines au cours desquelles je n’ai parlé que de films coréens, je suis tout de même allé voir quelques films, dont je ferai très bientôt un petit compte-rendu.
En attendant, juste avant le début du festival, j’étais allé voir le Clones de Jonathan Mostow avec quelques attentes. A la vision du film, une question m’a assailli : peut-on raconter une telle histoire en 1h30 ? A n’en pas douter, cette durée sied parfaitement au genre comique, à l’animation, ou aux films très chiants devant lesquels on n’a pas envie de traîner plus de deux heures. Il ne suffit pourtant pas à tous les films de 90 minutes pour exploiter tout leur potentiel. Les polars futuristes sont rarement aussi courts. Cela ne semble pas avoir inquiéter les mains et cerveaux se cachant derrière Clones… à tort.
Bruce Willis y incarne un agent du FBI dans un présent différent du nôtre. L’être humain ne sort presque plus de chez lui, et vit à travers un clone modelé à sa convenance, relié à lui par une technologie révolutionnaire. Le clone est un deuxième corps, plus beau, plus résistant. Ce nouveau système de fonctionnement a considérablement réduit la criminalité, et ne trouve qu’une poignée d’opposants vivant à l’écart des autres, sans machines pour vivre à leur place. Dans ce climat où le clone est réputé sans danger pour son utilisateur, l’agent Greer (Bruce, donc), se voit confier l’enquête sur un meurtre étrange. Alors que la mort d’un clone n’entraîne généralement pas la mort de son utilisateur, voilà que deux personnes sont mortes en même temps que leurs avatars.
Si je détaille autant le résumé, c’est pour vous montrer à quel point le film avait sur le papier un certain potentiel, avec un sujet à enjeux forts (le clonage, l’intrusion dominante du virtuel dans le réel) et à ramifications multiples (la résistance, les complots, l’enquête…). Or la possible densité narrative de Clones n’est jamais vraiment mise en valeur. Jamais totalement exploitée. Au lieu de cela, on nous offre sur un plateau un thriller tendance SF proposant de l’action et un chouïa de réflexion, mais se contentant du minimum syndical, ni plus ni moins.
Le pire c’est que l’on pressent qu’à l’origine, les ambitions étaient plus grandes. Est-ce le studio Disney, distributeur, qui a demandé à Jonathan Mostow (réalisateur des solides Breakdown, U571 et Terminator 3) de couper et ne pas faire traîner l’intrigue ? Car des coups de ciseaux ont forcément été donnés, tant les raccourcis sont nombreux, les personnages peu épais, et les explications expéditives. Tout cela sent la bride, et c’est bien dommage. Avec de l’audace et au moins une bobine de plus, Clones aurait pu ressembler à un bon thriller futuriste, ce à quoi, en l’état, il ne peut absolument pas prétendre.
En 2010, Willis sera à l’affiche d’une autre adaptation de comic book (oui, Clones en est une) que l’on espère autrement plus réussie. Le tournage de Red est imminent, et la distribution fait déjà rêver : autour de l’ami Bruce en ancien agent de la CIA obligé de sortir de sa retraite paisible pour contrer un dangereux assassin, on trouvera Morgan Freeman, Helen Mirren, Brian Cox, John C. Reilly, Mary-Louise Parker, Richard Dreyfuss, Ernest Borgnine et Julian McMahon. Rendez-vous dans un an.