Les mauvaises langues diront qu'ainsi Sarkozy tenterait de s'introduire seul (et de s'emmurer ?) dans le Panthéon...
Levée de boucliers : ça va tomber !
Mais voilà : outre les difficultés que l'on va rencontrer avec le fils et la fille du romancier, le « symbole extraordinaire » que serait la présence de Camus dans ce lieu, dédié « aux grands hommes », a provoqué des réactions vives de la part des intellectuels. Et notamment celle de Michel Onfray, qui dans Le Monde, alors que La dépêche n'hésite pas à évoquer La deuxième mort de Camus.
Invitant le président à devenir camusien, Michel Onfray n'y va pas de main morte. « Monsieur le Président, je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps. » Impossible de donner tort à Nicolas, Camus fut l'un de ces grands hommes.
Camus fut l'opposant de toutes les terreurs, de toutes les peines de mort, de tous les assassinats politiques, de tous les totalitarismes, et ne fit pas exception pour justifier les guillotines, les meurtres, ou les camps qui auraient servi ses idées. Pour cela, il fut bien un grand homme quand tant d'autres se révélèrent si petits.Mais Onfray rappelle le discours du président du 20 décembre 2007 au palais de Latran : « Dans la transmission des valeurs et dans l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé. » Difficile de rester cohérent. Mais la Sarkolandie, quand elle ne parle pas d'augmenter le nombre de caméras de vidéo surveillance, n'en est pas à un paradoxe près...
Car l'américanophilie du président s'accompagne mal de cette volonté d'honorer Camus. Et d'ajouter : « Si vous voulez que nous puissions croire à la sincérité de votre conversion à la grandeur de Camus (...), il vous faudra commencer par vous. » Bim. Olivier Todd, auteur d'une biographie sur le romancier ajoute que ce transfert "gêne beaucoup de gens en ce moment. On se rend compte que Camus n'a pas besoin de Sarkozy, et que Sarkozy pourrait quand même essayer de se passer de Camus". (France 24)
Touche pas, tu vas le casser !
Nouveau plan de communication des conseillers en image de l'Élysée, voilà qui fait mal par où ça passe, mais invite à réfléchir à autre chose : la culture, et ici, la littérature, sont-elles des domaines refusés par les intellectuels à Nicolas Sarkozy ? Prônant la Rolex bling-bling de Séguéla, plus que la patience de Beckett écrivant Godot, on a presque du mal à voir comment le président pourrait se rapprocher des mondes littéraire et culturel. Particulièrement après ce qu'il a envoyé dans les dents de la Princesse de Clèves.
Après avoir expérimenté son pouvoir, le président se retrouverait en quelque sorte face à une chasse gardée : défense de venir nous salir les plates-bandes. Et surtout de tripoter avec des mains pleines de doigts rolexeux ce que l'on peut encore savourer, Monsieur le Président. Interdiction formelle de tenter de vous rattraper aux branches en récupérant vos absences dans le monde culturel en vous en prenant à Camus.
Rendre leur sens aux mots...
En fait, Monsieur le Président, laissez tranquille cet univers loin de vos Roujon-Macquart. Ce n'est pas que l'on pointe du doigt de petits manques dans votre culture, c'est que l'on vous laissera pas toucher aux choses que l'on aime, et qui ont encore du sens pour nous. Juste pour éviter que vous ne le vidiez, comme vous avez dénué de sens d'autres choses que vous avez pu toucher auparavant.