Personne n'en parle, ou si peu. Le chef de l'Etat a choisi de porter le fer sur des sujets connexes, clivants et symboliques, comme l'identité nationale. Une façon d'éviter les vrais sujets. Lundi, l'UMP s'était donnée le mot pour fustiger les "insultes" du Parti Socialiste contre Eric Besson.
Pôle Emploi est débordé
Dimanche, Hervé Novelli, le secrétaire d'Etat aux PME, a dû reconnaître que nombre d'autoentrepreneurs ne travaillent pas. Depuis le lancement du dispositif, le gouvernement feint de confondre le nombre d'auto-entrepreneurs déclarés avec des créations d'emplois. On compte 242 000 inscrits, mais seuls 40% des concernés déclarent une activité réelle. Hervé Novelli a indiqué que le chiffre d'affaires moyen déclaré, pour ceux-là, atteint "autour de 4.000 euros par trimestre", soit "autour de 1.400 euros par mois".
Lundi, Nicolas Sarkozy s'est exprimé devant 1 700 cadres de pôle emploi, en compagnie de Xavier Darcos et de Laurent Wauquiez. Le président français a donc exprimé sa «reconnaissance » et son « admiration » pour le travail accompli. Ceux qui attendaient des annonces, notamment en termes de moyens, en sont pour leur frais. Pas un mot non plus sur le récent rapport qui souligne combien la sous-traitance de la gestion de certains chômeurs à des entreprises privées est coûteuse et inefficace. Lundi, Sarkozy ne venait qu'avec de belles paroles dans sa besace : «Vous êtes en première ligne» ; «je veux vous dire ma reconnaissance, et même mon admiration» ; «vous êtes au coeur de la stratégie» ; «merci pour le travail qui est le vôtre». Le Monarque a répété son hostilité contre le « partage du travail » (une façon d'occulter tout débat sur la défiscalisation des heures supplémentaires qui décourage les rares recrutements) et les pré-retraites. En janvier dernier, il avait dû battre en retraite sur le sujet, en annulant la suppression de la dispense de recherche d'emploi pour les préretraités de 58 ans. Sarkozy s'est aussi félicité de l'efficacité de son gouvernement, avec ses « 650 000 » personnes ayant bénéficié de l'exonération totale de charges sociales cette année.
Aucune autocritique à l'horizon. La fusion de l'ANPE et des ASSEDIC, décidée quand la crise démarre, en septembre 2008, devait faciliter le traitement des demandeurs d'emplois, et favoriser la constitution de guichets uniques. Faute de moyens et à cause de l'envolée du chômage, le système est engorgé. Actuellement, chaque conseiller suit en moyenne plus de 94 chômeurs, alors que le gouvernement tablait sur une fourchette comprise entre 30 et 60. Un conseiller de Pôle Emploi sur cinq s'occupe de plus de 130 demandeurs d'emploi. Qui a dit que pôle emploi n'était pas engorgé.
Si prompt à promettre, le président est resté cette fois-ci avare de toute annonce concrète : il est "prêt" à discuter de moyens supplémentaires... Cela fait près d'un an que les salariés de pôle emploi sont prêts...
Les sans-papiers sont exploités
Dimanche dernier, Xavier Darcos, ministre du travail, puis Eric Besson, ministre de l'identité nationale, ont lancé une charge contre le travail illégal. Besson a promis une nouvelle loi. Les deux ministres sont en fait bousculés sur le sujet depuis des lustres. Des sans-papiers manifestent régulièrement contre leurs conditions de travail. Près de 1500 d'entre eux sont en grève depuis 5 mois dans 1 800 entreprises. Des cas honteux, chez des prestataires de la RATP, de la SNCF, dans des restaurants luxueux, voire sur un chantier présidentiel, en 2008, à la résidence de La Lanterne, ou à Paris, au centre Kléber, ont été régulièrement mis à jour. Des syndicats CGT, CFDT, SUD et FSU soutiennent leurs demandes de régularisation.
Xavier Darcos, de son côté, botte en touche. Dimanche, il a refusé de se prononcer sur ces demandes : « Ma mission n'est pas d'intervenir dans la question de la régularisation, mais de combattre le travail illégal sous toutes ses formes. » le ministre a également répliqué, dimanche, qu'il lançerait un plan d'ensemble contre le travail au noir. Le dispositif prévoira la possibilité de fermeture administrative des établissements employant des étrangers en situation irrégulière, une décision attribuée aux préfets ; la suspension des exonérations de charges sociales chez les « donneurs d'ordre ». A lire les déclarations du ministre, on sent poindre la tartufferie. Xavier Darcos a pris soin de préciser dans quel cas il voyait normal de fermer l'établissement d'un employeur de sans-papiers : «S'il est avéré que l'activité de l'entreprise est construite autour du travail illégal ou de l'emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail, on pourra fermer administrativement cette entreprise ».
Eric Besson est également régulièrement pris en défaut sur sa timidité à agir contre les employeurs de sans-papier. Depuis sa création, le ministère de l'immigration est plus actif contre les sans-papiers que leurs employeurs. En 8 mois de présence à son ministère de l'immigration, Besson n'a pu relever que 1 500 contrôles d'entreprise. Dimanche, le ministre a lui aussi annoncé de prochaines mesures sur le sujet, sous la forme d'un projet de loi de "lutte contre les abus". Aux deux sanctions proposées par son collègue Darcos, il ajoute «l'inéligibilité à tout appel d'offres public ou privé de toute entreprise qui aurait employé» des sans-papiers, une majoration des amendes à l'égard des entreprises fautives et le «remboursement des aides publiques ». Ni Darcos ni Besson n'acceptent donc la régularisation des travailleurs sans-papiers.
A gauche, on critique l'absurdité de la proposition gouvernementale. Martine Aubry et Vincent Peillon se sont déclarés favorables à la régularisation. Olivier Besancenot a eu les mots justes : "Il faut être un peu sérieux : on va fermer quoi ? Bouygues, la RATP ? C'est une blague !", a-t-il déclaré sur i-Télé lundi 23 novembre. "La seule solution c'est la régularisation des sans-papiers". La CGT critique cet artifice législatif : "ça (ne) sert à rien » a expliqué sur France 2 Francine Blanche, secrétaire confédérale de la CGT. "On ne peut pas mettre dans le même sac un grand donneur d'ordre et des petits employeurs qui sont les boucs émissaires de cette affaire, et faire peur à des employeurs individuels qui ont besoin de nounous pour leurs enfants". Il est une déclaration qui a été peu relayée : Christian Charpy, le directeur de pôle emploi, a rappelé que ses services étaient en mesure d'indiquer aux entreprises qui en feraient la demande si un employé immigré avait ses papiers en règle ou pas. Pôle emploi, annexe du ministre de l'immigration ?
Un collectif propose le boycott économique du pays, l'espace d'une journée. Une "journée sans immigré, 24 heures sans nous", fixée le 1er mars prochain, pour rappeler à chacun les apports essentiels de l'immigration. La démarche, qui rencontre un franc succès sur internet, percute le débat faussement identitaire lancé par le ministre Besson.
Le 1er mars 2005 est entré en vigueur le «code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile» (CESEDA), plus communément appelé le code des étrangers. Cette loi symbolise une conception utilitariste de l’immigration, en d’autres termes, une immigration choisie sur critères économiques. Nous ne pouvions trouver de meilleur jour pour appeler à « une journée sans immigrés ». Nous, immigrés, descendants d’immigrés, citoyens conscients de l’apport de l’immigration à notre pays, sommes tous des consommateurs et nous participons quotidiennement à la croissance de notre pays.Les paradis fiscaux changent de nom
Notre action citoyenne a pour objectif la mise en valeur de l’apport de chacun d’entre nous à la prospérité générale. Nous avons tous le pouvoir d’agir sur notre avenir alors, prenons-le !
Le 1er mars 2010 : Agissons en cessant de consommer et/ou de travailler.
Durant 24 heures, participons à la non-activité économique dans les entreprises, dans les associations, dans la fonction publique, dans les écoles et les lycées, dans les universités, dans les hôpitaux, dans les associations, dans les commerces, dans l’industrie, dans le bâtiment, dans l’agriculture, dans les services, dans les médias, dans la politique…
Pour la première fois en France, nous décidons de ne pas participer à la vie de la Cité. Par cette absence, nous voulons marquer la nécessité de notre présence.
Dans son combat symbolique contre les paradis fiscaux, le gouvernement tente de faire bonne figure : il a introduit quelques nouvelles mesures dans son « collectif budgétaire » examiné ces derniers jours pour l'année 2009. Exercice de sémantique, un paradis fiscal est désormais un Etat ou un territoire non membre de l'Union européenne qui n'a pas signé avec la France une convention d'assistance administrative avant le 1er janvier 2010. Ainsi, le Luxembourg, membre de l'UE, n'est pas visé par ces nouvelles dispositions.
Parmi ces mesurettes, le taux de retenue à la source sur les dividendes, intérêts et redevances versés à des bénéficiaires établis hors de France est porté à 50% quand ces bénéficiaires habitent dans des pays "non coopératifs" . Ce taux varie de 12% à 33% actuellement.
Autre nouveauté, les charges d'intérêts, redevances, ou rémunérations de services payées ou dues par un résident français à un opérateur situé hors de France ne seront plus déductibles des impôts si leur bénéficiaire bénéficie d'une « fiscalité privilégiée ». Le gouvernement est cependant prudent : cette disposition n'entrera en vigueur que... le 1er janvier 2011. Le régime «mère-fille», qui permet à une société mère de défiscaliser ces profits par le versement de dividendes de ses filiales à son profit, sera exclu si la filiale est établie dans un paradis fiscal.
Le gouvernement a dû également faire un petit pas vers les recommandations de la Cour de justice européenne. Cette dernière exigeait que les groupes français incluent dans leur résultat imposable ceux de leurs filiales détenues à 95% mais indirectement par l'intermédiaire de sociétés établies hors de l'UE. Le régime français limitait l'intégration fiscale, sous certaines conditions, aux seules sociétés établies en France. Désormais, le régime va autoriser l'interposition entre une société mère et ses filiales d'une société située dans un autre Etat de l'UE.
La santé coûte plus cher
Une étude intitulée " Dépense de santé et budget des ménages : évolution depuis 2001 " sera dévoilée le 25 novembre prochain. Les Echos en publié quelques extraits il y a quelques jours. Roselyne Bachelot, tout occupé à vendre les 94 millions de doses qu'elle a commandé cet été contre la grippe A, aura sans doute quelques mots de commentaires. Malgré l'absence de réforme majeure (exception faite des déremboursements récurrents comme les nouvelles franchises médicales mises en place par Nicolas Sarkozy en janvier 2008), à cause d'une inflation du coût des soins et des médicaments, les Français ont subi de plein fouet une augmentation régulière et douloureuse des frais des santé restant à leur charge: +50% depuis 2001 ! "Cette augmentation est généralisée, quel que soit le mode de couverture (individuel ou collectif), le profil de l'assuré (jeune, famille, senior), le niveau de revenu ou la localisation", note Les Echos. "On observe un creusement très net des inégalités : entre individuel et collectif ; entre actifs et seniors ".
Bref, la santé pèse plus cher, et les ménages modestes sont les premiers touchés. Pourtant, en Sarkofrance, on parle "déficit" et "déremboursements", jamais remise à plat de la solidarité sanitaire.
Santé, chômage, ou sans-papiers, la Sarkofrance choisit ses sujets et élude les autres.
Ami sarkozyste, où es-tu ?