En clôture des journées internationales de l’IDATE qui se déroulaient à Montpellier les 18 et 19 Novembre, Nathalie Kosciusko Morizet, la secrétaire d’Etat à l’économie numérique a bien voulu en dire un peu plus sur la partie numérique du grand emprunt. Interrogée par Yves Gassot, Directeur Général de l’IDATE, elle a précisé que l’industrie du numérique bénéficierait dans le cadre du grand emprunt de 4 milliards d’investissements sur les 35 milliards prévus. Première satisfaction avouée pour la secrétaire d’Etat : le numérique fait partie des 7 secteurs prioritaires. Cela ne semblait pas acquis au départ. Dans le détail en revanche, cela reste un petit peu flou. Dans le cadre du grand emprunt, il est prévu que 2 milliards soient consacrés aux infrastructures pour accélérer le passage de la France au haut débit et 2 milliards au développement de nouveaux usages (e-société) et des contenus numériques. Pour structurer cette approche, une agence pour le numérique sera créée et aura pour objectif d’élaborer des partenariats publics privés de recherche pour financer les usages et les contenus innovants. Pour la secrétaire d’Etat à l’économie numérique, il est encore trop tôt pour avoir une idée précise du mode de fonctionnement de cette agence, mais la priorité semble être au co-financement des projets. En revanche, elle est restée vague sur les domaines concernés. Elle a un peu évoqué le domaine numérique de la musique et a rappelé qu’elle avait déjà lancé des initiatives sur le contenu comme les appels à projets autour du serious gaming et des mobiles. En ce qui concerne les infrastructures, elle a insisté sur la nécessité d’offrir le haut débit à tous. Elle a notamment déclaré : « la priorité est à l’ADSL à très haut débit mais aussi à une solution satellitaire avec le CNES (30 M€ devraient être investis selon sa déclaration) qui permettrait de proposer dans les zones de faible densité un débit équivalent à celui de la fibre optique pour le prix actuel d’une prise de fibre optique en zone dense. Comme le précisait la secrétaire d’Etat au cours de cet entretien, il s’agit bien de prendre le relais des opérateurs privés dans les zones de moyenne et faible densité qui sont difficiles à rentabiliser et d’offrir des infrastructures très haut débit partout en France. France Télécom devrait d’ailleurs être un des grands bénéficiaires du grand emprunt. Le patron de France Télécom qui intervenait juste avant à la tribune de l’IDATE ne s’est pas privé d’un petit effet d’annonce en soulignant que France Télécom serait dans les mois qui viennent un acteur actif de la généralisation du haut débit en France. France Télécom aux cotés des pouvoirs publics pour une société numérique plus juste, voici une annonce qui devrait redorer le blason d’un ancien fleuron de l’Etat mis en cause dans sa politique de transformation. Si France Télécom bénéficie d’une aide de 2 milliards, on peut comprendre la satisfaction de Didier Lombard. Parallèlement, le président de France Télécom a été très clair sur un autre point : France Telecom va continuer à investir dans les contenus et l’hébergement de services grands publics et professionnels. En conclusion, France Telecom avec l’aide de l’état fera des infrastructures et avec l’aide de l’argent des actionnaires, il fera des contenus à valeur ajoutée de type Orange Store et du Cloud Computing pour les entreprises. Cela devrait ravir ses principaux concurrents.
JEI : attendre le plan dédié aux PME/PMI innovantes
A écouter Didier Lombard et Nathalie Kosciusko Morizet, les décisions prises dans le cadre du grand emprunt devraient permettre de relever le défi du numérique en France pour les prochaines années. Si 4 milliards ce n’est pas rien, la secrétaire d’Etat a été incapable de donner des détails sur les priorités. Parallèlement, rien n’a été annoncé sur le financement des Jeunes Entreprises Innovantes dans le secteur des NTIC.
« Il faudra attendre le plan spécifique de 2 milliards d’investissements dédiés aux PME/PMI innovantes pour que les JEI puissent disposer de nouvelles aides », c’est du moins la réponse faite par Nathalie Kosciusko Morizet à un jeune entrepreneur qui posait la question sur la présence ou non d’aides spécifiques au financement dans le cadre du grand emprunt. Bien sûr, la réponse peut surprendre quand on connait les difficultés actuelles des jeunes entrepreneurs : faillite du capital risque français, quasi disparition du seed et de l’amorçage et de nombreuses difficultés à se faire entendre d’Oseo et des fonds ISF qui préfèrent financer des projets plus ambitieux en terme d’emploi et de TRI. En clair, la priorité n’est pas dans le seed ou l’amorçage mais clairement dans le renforcement du tissu français des PME/PMI. En prolongement des mesures annoncées en octobre (investissement de 1,650 milliard en fonds propres ou actions convertibles dans des PME/PMI ) par l’intermédiaire principalement du FSI et d’Oseo (1 milliard en prêt participatif), 2 milliards seraient de nouveau investis dans des PME/PMI innovantes. La commission du grand emprunt propose donc de créer un ou plusieurs fonds d’amorçage transversaux pour soutenir les premières années d’existence de PME et d’entreprises de taille intermédiaire jusqu’à 5000 salariés. La priorité ne semble pas donc au seed et à l’amorçage mais au renforcement du tissu des PME/PMI. La secrétaire d’Etat a d’ailleurs plaidé dans son intervention pour un Small and Business Act à la Française. Cela vient confirmer qu’il faudra mieux être une PME/PMI en mal de fonds propres qu’une JEI dans les mois qui viennent. C’est un peu dommage lorsque l’on connait l’importance de l’amorçage dans tous les domaines de l’économie du numérique. D’autant qu’il n’est pas certain que dans ce secteur nous ayons aujourd’hui les champions dont nous aurons besoin pour demain.