Kinatay - De Brillante Mendoza

Par Kilucru

Kinatay
Un film de
B
rillante Mendoza
Avec Coco Martin (Peping), Julio Diaz (Vic), Mercedes Cabral (Cecille), Maria Isabel Lopez (Madonna), John Regala (Sarge), Jhong Hilario (Abyong)...
Prix de la mise en scène - 62ème Festival de Cannes 2009
Synopsis
Peping, un jeune étudiant en criminologie, est recruté par son ancien camarade de classe, Abyong, pour travailler en tant qu’homme à tout faire au service d’un gang local de Manille. Cette activité lui permet de gagner de l’argent facilement pour faire vivre sa jeune fiancée, étudiante elle-aussi, qu’il a décidé d’épouser. Mais pour ça, il lui faut encore plus d’argent. Abyong propose alors au jeune homme de s’engager dans une « mission spéciale », particulièrement bien rémunérée...°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°
"L'intégrité, une fois perdue, est perdue à jamais" Brillante Mendoza
Cela démarre dans la lumière, dans l’agitation qui semble perpétuelle des terrasses et enchevêtrements de Manille, des cours où toute une population s’active, des lieux de misère où l’on fait sécher son linge tandis qu’un coq se fait trancher le cou et que rougeoient les braises d’un barbecue de fortune. Ici et là toute une marmaille s’agite, joue ou pleure, les plus grands cherchent le moyen de gagner, de grappiller quelques sous. C’est bruyant, c’est coloré et la caméra s’en donne à cœur joie, prenant de la hauteur pour saisir l’ensemble, où s’introduisant dans ces étroites ruelles, une vision remuante que cette optique portée. Elle provoquerait presque le tournis, comme une légère nausée, faut il voir un présage, un aperçu que ce qui bien après suivra ?
Ensuite vient le bruit, de plus en plus fort, la mégapole vrombit de toute part alors que Peping et sa fiancée empruntent jeepneys et bus pour retrouver leur famille, certains venus de loin assister au mariage. Célébré, fêté au snack local par un plantureux repas, nos deux jeunes mariés retrouvent ensuite le coutumier. Leur foyer modeste et leur tout jeune enfant pour elle, l’école de police pour lui , ses fonctionnaires sont nombreux dans la capitale.
Nombreux et sous payés, deux mots pour une porte ouverte sur la corruption, déjà Peping améliore son ordinaire de quelques menus trafics, la séquence du début, où à l’issue du repas il ramasse le pourboire laissé par son parrain et le glisse à son frangin qui lui réclame de l’argent est significative. Le soir avec un compère Abyong il collecte l’argent de quelques revendeurs de drogue, dans la nuit tombante argent et boulettes changent de mains. La journée devrait s’arrêter là, mais ce soir une mission plus importante ….pour Peping une première, on le sent happé, n’osant refuser, ne sachant ce qui l’attend…

Voici le petit jeune homme propret dans son polo d’élève, à l’arrière d’un minibus parti pour sillonner la nuit. Devant des hommes que l’on devine imposants, plaisantent et jurent, autour défilent les néons, promesses de nuits fiévreuses et de sexe monnayé !
L’équipée est à la recherche de Madonna, facile à trouver et à embarquer. Le ton monte, les coups pleuvent. Là, séquestrée, bâillonnée, estourbie, à même le sol du fourgon celui-ci s’éloigne, quittant les lumières de la ville pour l’obscurité. Nous plongeons dans le noir, à peine de temps à autre une lumière extérieure, découpant les ombres des occupants du van. Dans le silence épais qui s’est installé se devine une tension, est-ce la notre, celle de Peping, les deux sans doute !
Des questions pleins l’esprit, où allons nous, la fille ne gémit plus, ne bouge plus, est elle…Que pense Peping, regrette-il déjà….la durée du voyage, une pause pour pisser, perdu dans ses pensées, songe-t- il à fuir, le pourrait il ?
Et puis enfin les grilles d’une propriété négligée, un peu de lumière…et la suite… la fille que l’on réveille d’un seau froide, les plus jeunes que l’on envoie chercher caisse de bières et cigarettes, et Peping hésitant face à son portable.
Puis vient le reste, des images qui choquent et c’est le spectateur qui se prend le seau d’eau glacé en pleine figure, le rythme heureusement s’accélère écourtant l’insupportable.
Et quand viendra le jour une victime sera éparpillée aux quatre coins de la ville, message d’effroi, avertissement, personne ne le sait vraiment, les infos baladent leurs caméras dans toute la ville, filmant aussi bien un homme prêt à se jeter du haut d’un immeuble qu’une tête retrouvée dans un tas d’immondices.
Toutes ses violences presque ordinaires, qui revêtent des apparences cauchemardesques aux couleurs de la nuit et s’atténuent et s’apaisent avec le jour, noyées dans le flot d’un quotidien presque banal !
Ainsi de Peping, quelques billets en poche de plus, il revient vers son présent, peut etre les cauchemars viendront ils avec la nuit, ou alors à l’instar de ces hommes aguerris glisseront ils tout simplement, comme sur ce militaire, galonné, n’est-ce pas là son métier, tuer, certain voudrait même en faire un art !
« Kinatay renvoie à des lâchetés universelles, à la difficulté d'intervenir, à la transformation d'un innocent en monstre par son silence. La captation d'une telle impuissance devant tant d'inhumanité est magistrale. »Le Monde.Fr
Excessif.Com "...Mendoza au sommet ou au plus bas ? On hésite (un peu, beaucoup, à la folie)..."
Evene.Fr "...Comment recommander ‘Kinatay’, alors que personne ne sortira indemne de ce cauchemar ? .."
Telerama.Fr "..A Cannes, Kinatay a obtenu le Prix de la mise en scène. Choix judicieux (bravo au jury d'Isabelle Huppert), récompense courageuse pour ce film à l'étonnante rigueur et à l'extrême audace. Car ce massacre - c'est ce que signifie kinatay en philippin -, Mendoza aurait pu le filmer avec mesure. Flatter notre goût pour le bon goût. Miser sur la sacro-sainte épure. Reléguer en coulisses - hors champ - l'horreur et l'ignominie.
Lui a choisi de montrer. Mais juste ce que surprend l'oeil de Peping. Il insiste moins sur l'horreur que sur les conséquences de l'horreur sur un innocent qui, précisément, n'en croit pas ses yeux..."

Le Monde.Fr - "Kinatay" : dépeçage d'une effeuilleuse à Manille