Ce roman traite de l'adolescence et des difficultés que certains vivent de manière parfois radicale.
L'originalité de ce livre paru dans une collection pour adolescents est qu'il met à jour des paradoxes.
Les difficultés qui nous sont présentées sont celles d'un absent : Philippe a disparu, il s'agit d'une fugue.
Dans la famille qu'il laisse au désarroi, pas de violence, pas d'autoritarisme, pas de frustrations...
Les parents sont aimants et représentatifs d'une classe sociale qui pourrait s'apparenter à celle des "bobos" chantés par Renaud.
Celui qui est parti semblait plutôt bien dans ses baskets, grand, "beau gosse", faisant l'admiration de sa petite sœur...
Personne n'aurait pensé qu'il était en grande difficulté.
La narratrice de ce drame familial est la cadette.
Elle nous propose un récit en trois parties où l'on comprends que pour exister, son frère devait disparaître de la sphère familiale.
Cette construction révèle un portrait en creux.
Celui qui est au centre du roman est parti, et nous n'apprenons à le connaître qu'à travers les différents points de vue des membres de la famille en train de réagir à sa disparition.
Le lecteur comprend à la fin de cette histoire que le fugueur n'a jamais eu l'occasion d'être aussi présent parmi les siens qu'en disparaissant.
Le point de vue de la cadette est touchant et sans concession vis à vis de ses parents et de son frère.
Elle ne comprend pas sa révolte secrète.
Elle a souffert d'inquiétude, de sentiment d'abandon, elle s'est sentie trahie en même temps que coupable de n'avoir pas su voir ni entendre...
Le retour de Philippe, loin d'être un moment heureux, est décrit avec beaucoup de réalisme.
La vie dans la rue faite de violences et de privations a changé son frère à jamais.
Elle s'est rendue compte qu'elle ne le connaissais pas vraiment quand il était à ses côtés et lorsqu'il revient, elle découvre un être meurtri et blessé.
Celui qui est parti en quête de liberté et d'identité s'est perdu et est revenu hagard et diminué, portant sur lui, déjà, des stigmates de carences de soins qui n'en valaient peut-être pas la chandelle.
J'ai trouvé ce livre bien construit, original et juste dans sa manière d'aborder un sujet difficile et complexe.
"-Les mots, d'accord, c'est compliqué. On se plante souvent, on dit un mot pour un autre et ça dérape et on finit par s'engueuler. - Sauf qu'on ne s'engueule jamais dans cette maison. L'autre jour, c'était la première fois. -Non, on ne s'engueule pas, on se barre ! je réplique aussitôt. Et je ne dis pas ça que pour toi. Il y a des milliers de façon de ne pas être là."
Le blog de l'auteur, un autre joli billet de l'auteur sur ce livre,
Il est conseillé sur Lirado,
La chronique de Sophie Pilaire sur Ricochet,
Celles de Lecture Jeunesse,
Et aussi celle d'Anthony, présentée par la bibliothèque municipale Robert Desnos de Montreuil et actu.sf,
Joëlle Turin en parle sur scéren,
Clarabel nous dit qu'elle a beaucoup aimé, Gaellou aussi,
Il a été remarqué par un brin de causette.