Bienvenue chez moi!
Depuis le temps qu’on se côtoie, je me suis dit que c’était un sacrilège de ma part de ne pas vous avoir fait partager avec moult fougue mon environnement naturel (quand même, oh!).
Merdum, il va donc falloir que je remédie très vite à cela…
Alors, pour commencer, je vais vous parler de mon monde à moi, mon quartier, ma ville, ma planète, avec sa faune et sa flore.
Bon, je vous préviens tout de suite, il faut être à l’affut, parce que les bestioles de ce pays sont furtives et fugaces, apparaissent, mais disparaissent aussi vite et surtout, vous n’êtes pas sûres de les revoir un jour. Non. Même si vous les appelez avec votre super-sifflet-qui-imite-vachement-bien-le-cri-de-la-carotte. Oubliez.
Autant vous dire que quand vous en voyez une (de bestiole m’enfin, pas de carotte!), vous tentez comme vous le pouvez de capturer l’instant avec votre méga-reflex-tout-puissant-à-douze-millions-de-pixels-et-douze-millions-d’euros, mais au final, vous n’avez que du flou (ça valait le coup de le payer aussi cher, ce reflex! pfff n’imp’!). Je vous ai prévenues.
En plus l’appareil il faut le garder bien planqué si vous voulez le retrouver le soir! On a pas mal de petits singes chapardeurs qui poussent des grands cris, qui ont des grandes dents pour te faire très peur mais qui courent super vite et vous, en talons, ben vous faites pas le poids, même si vous vous êtes entraînée pendant un an pour le Championnat National de Course en Talons. Faut pas rêver non plus, hein…
Alors pour commencer, il faut que je vous situe un peu ma bâtisse. C’est une bâtisse des années 70, qui paye pas de mine. Remarquez, dans ce coin-là, vaut mieux être discret, sinon, gare aux troupeaux que tu réveilles et qui te fondent dessus sans crier gare!
Non, non, il ne crient pas gare! ils ne savent pas ce que ça veut dire. D’habitude ils crient « hé?! t’as pas une clope?? zyva, t’as pas une clope?! vazy, p’tain, file une clop’!!« . Et il paraît qu’ils te tchipent après.
Bon, tchiper, je sais pas ce que c’est, c’est ma fille qui m’a dit qu’en fait ils tchipaient tout le temps, ils font des bruits bizarres avec leur bouche, mais là, je serai incapable de vous le faire. Je ne fais pas partie de la bande.
Donc, moi, comme je ne comprends pas trop ce genre de charabias et comme je n’ai pas vraiment de patience, je les évite.
Il y en a pas mal vers chez moi, c’est des bestioles très très instables de la race des bouffons musqués à capuche.
Kézako?
Le bouffon musqué à capuche, se déplace préférentiellement en bandes, il est reconnaissable à ses énormes poches boursoufflées… En règle générale, il se déplace la nuit, il est un peu nyctalope (si tu sais pas ce que c’est, paye-toi un dico).
Par ailleurs, j’ai eu l’occasion d’en attraper deux en pleine lumière au petit matin (le coup de bol!), profitez-en bien, c’est très très rare.
D’habitude, ils dorment lourdement jusqu’à pas d’heure, enfermés dans une chambre sombre, fenêtres fermées, sans ventilation. Aucune. La ventilation ferait s’évaporer l’odeur un peu toxique, musquée et puissante du bouffon à capuche et il se sentirait ensuite perdu au milieu de ses congénères.
Le bouffon musqué à capuche est une espèce très complexe, parfois quand il se met sur un ordinateur, il peut même envoyer des trucs comme ça: « Je suis chatains mesure 180cm je pese 85kg j ai les balades en foret le velo les restauts et les femmes simple et sans pris de tete » (c’est véridique, je viens de le recevoir à l’instant)… Je comprends pas, c’est pourtant pas la saison des amours?! Mais sinon, ils sont gentils, ils restent loin.
Parfois, au détour d’une rue, on trouve aussi des vieux à tupperware rectangulaire avec imper beige qui sortent de derrière une voiture. Ils sont bien mis, avec des chaussures noires reluisantes et un journal sous le bras. En général, ils sont à moitié dégarnis, et marchent avec le bras tendu avec un tupperware au bout. Vide.
C’est pour préparer l’hibernation.
Ils partent récolter des glands et des pommes de pin pour passer l’hiver, toussa, toussa. Des fois, on a envie de leur donner un petit bout de pain, comme ça « peeeeetit petit petit petiiiiiit!!« , mais ils se retournent rarement pour l’attraper, ils n’ont pas beaucoup de réflexes. C’est grand dommage.
Bon, ma bâtisse, donc, est située en plein milieu du village. Autour y’a que des arbres. Sympa pour les moustiques en été. Gros comme ça. Et moi je me fais piquer tout le temps.
Bon, là, il faut que je vous laisse un peu parce qu’il faut que j’aille me préparer pour mon cours de j’me-pends-la-tête-en-bas.
C’est promis, je vous raconte très vite la suite!