Au jeu des équations stupides, cette semaine Musique+Hormones = Fille+Rock = Newcomer x2. Une américaine et une britannique à écouter seul dans sa chambre. Il y a des troubles, Messieurs, que l'on ne partage pas.
En me rendant pour un après-midi à la Cinémathèque française, je m'attendais à surgir dans un rêve Nouvelle Vague. Pour être franc, ce n'était pas de voir surgir des Néo-Godard qui m'excitait. J'attendais plutôt un défilé de filles en réminiscences sixties : bruissements de robes et de velours sur claquement de talons ? Exhalaisons de fumée ? Cruelle déception et peu de grâce pour mes songes clandestins. Je ne crois pas que cela soit à mettre au compte d'une mauvaise journée : entre médiocrité du film français et victoire de la série américaine, la culture cinéphile s'enterre sous l'art contemporain. La Cinémathèque a migré rue de Bercy et les naïades à Beaubourg. Je rentrais, résigné à l'exutoire si peu érotique qui m'attendait pour ouvrir la soupape de la soirée solitaire/sopalin.
Dans cette galerie, ce n'est que filles et guitares. Cela a toujours été pour moi un sujet à la fois obscur, anecdotique et fascinant. Il faut bien avouer que le rock, sur scène, fut au départ une affaire d'hommes. Les gamines n'avaient plus qu'à se mettre devant, derrière ou sur ses côtés. Mais lorsque les groupies voulurent s'extraire de leur rôle de secrétaire du rock, il fallait encore trouver la posture de leur féminité. L'attitude choisie dépend souvent du nombre et genre du groupe. Il y a le pack ovulation, de 2 à 3 filles, avec les Pierces ou les Pipettes. Au-delà, la teneur en œstrogène se dilue pour arriver à proprement parler dans les girls band. Oscillant entre bitch et butch en plein complexe fémisogygne, la femme n'est pas qu'une femme, c'est un rocker comme les autres qui boit de la bière et envoie du riff qui tâche. D'un autre côté, elle ne veut pas abandonner sa part glam au féminisme du poil. L'imagerie s'en ressent, des Runaways au Donnas. Une demoiselle DANS un groupe d'hommes c'est souvent classe: Kim Deal, Meg White... Mais si elle se fait frontwoman pour subordonner le mâle, la réaction est différente. Entendant les jappements de Karen O ou les gémissements d'Alison Mosshart, les bûcherons dans le fond de la salle se poussent du coude : enfin des petites qui n'ont pas besoin d'une barbe pour avoir l'air sauvage. Sexe faible dites vous, qui n'a jamais l'air aussi fort qu'entouré d'hommes.
Bienvenue sur le Myspace du duo Comanechi, à la devise couleur cyprine qui déboutonne : « Thanx for your hot pussy ». Simon ne se remarque pas vraiment, caché derrière sa tignasse et son binôme. Akiko est une dandie grunge noise fluo bridée, yin & yang, parfaite opposée de la pimbêche hallucinogène précédente. Akiko aime les sucettes, les sucettes un peu shoegaze, un peu punk aussi, qui dilatent ou irritent le son. Mais les cristaux de sucre pop qu'elle sert ne sont que poison. La voir jouer son Ep chez Vice avec un tourne-disque en plastique enlève le doute d'une personnalité dérangée. C'est une sorte de cousine d'Alice Glass dans la famille femme-fontaine de bruit. Un peu de folie au bord de la morsure, qu'elle chante ou crie, donne l'excitation de l'incertitude. S'attendre à tout, esperer une moue quand elle se colle index-majeur au fond de la gorge. Pourvu qu'elle ait un stérilet.
Les filles électriques ne brûlent jamais plus que lorsqu'elles sont seules, cernées par des garçons frigides. Elles savent me remettre à mes obsessions, entre fantômes du passé et fantasmes du présent. Chaque écoute se termine pareil: j'imprime le rythme et le tâche d'ectoplasme, casque sur les oreilles pour que le voisin n'entende pas.
http://www.myspace.com/dumdumgirls