L'HISTOIRE : Deux amis collectionneurs d'art sont responsables d'une galerie à San Francisco. Ils sont d'origine allemande, ayant fui l'Europe après le traumatisme de la Première Guerre mondiale. L'un des deux, Martin, repart au pays natal ; l'autre, Max, reste à San Francisco. C'est le point de départ de leurs lettres. Martin ouvre une galerie à Munich. Après avoir fait le constat de la pauvreté et de l'humilité extrême dans lesquelles vit la population allemande, il est rapidement fasciné par le personnage d'Adolf Hitler, qui vient d'apparaître sur la scène politique. Il devient cadre du parti nazi. Max, à distance, demande des explications à Martin : il ne comprend pas comment son ami peut se fourvoyer avec des gens qui méprisent la culture humaniste et le modernisme, des gens qui sont en train d'organiser l'élimination des Juifs.
Ce ne sont pas plus d'une trentaine de lettres en une soixantaine de pages, mais l'écriture de Kressman Taylor est terriblement efficace. Le désarroi de Max et la froide rigueur de Martin ne nécessitent aucun débordement. Dans le moment le plus tendu de l'intrigue, un câblogramme tient lieu de lettre. Plus de place pour les impressions, les nuances, l'échange cordial entre deux hommes cultivés : revenons-en à la poésie rugueuse des échanges commerciaux... sauf que ça ne fait pas très propre, un cadre nazi faisant commerce d'art dégénéré avec un Juif américain.
La correspondance s'arrête en mars 1934. Le pire est encore à venir, mais l'incendie du Reichtag a déjà eu lieu et la nuit des longs couteaux arrive. La dernière lettre de Max Eisenstein à son associé Martin Schulse finit par lui revenir : Inconnu à cette adresse.
Un grand petit livre.
91 pages avec le très intéressant dossier, coll. Livre de Poche Jeunesse - 4,90 €
Ce livre fait partie de la Quinzaine des correspondances