Commentaires de Daniel
Repas n° 1
Les plats ont été choisis et élaborés, avec comme fil directeur, des accords essentiellement de saveurs et de fraîcheur, l’acidité gustative des Sauternes, dans le millésime 1988 étant particulièrement évidente. Les conditions météorologiques, qui ont présidé à la naissance du millésime 1988, ont favorisé le développement d’un botrytis complet donnant un millésime d’exception, grâce à des acidités qui offrent un équilibre magistral aux vins. La puissance, la largeur, et l’opulence de Rabaud Promis, issu de sous-sols argileux, associés à des graves contrastant avec la densité de la texture de Climens, bâti tout en longueur avec une acidité gustative plus apparente due au sous-sol calcaire de cette propriété Les vins ont été dégustés seuls (voir les commentaires ci-dessous) puis avec les mets.
Sauternes : Château Rabaud Promis 1988
La robe présente une teinte dorée soutenue, à très légèrement ambrée, avec des larmes bien dessinées au bord du verre. Le nez est intense, net, et complexe, avec des arômes d’abricots rôtis, de miel, de mangues un peu éthérées, de cire, et de curry. La bouche est riche, pleine, glycérinée, avec beaucoup de velouté dans la texture, les fruits sont parfaitement rôtis soulignant la grande qualité du botrytis; de l’amplitude, du volume, et du gras, en milieu de bouche, la finale est longue, généreuse dans sa chair, et complexe dans l’association des saveurs délivrées par les fruits et les épices, très bien équilibrée par l’acidité inhérente au millésime. Noté 17+
Sauternes : Climens 1988
La robe est jaune dorée, avec des larmes nettes au bord du verre à l’agitation, l’olfaction d’abord discrète, s’ intensifie à l’aération, avec des parfums très purs d’abricot, de fruits exotiques, et d’oranges, rôtis et finement miellés, accompagnés de notes florales, et d’épices (curry dominant ). En bouche, beaucoup de concentration, dans une matière serrée, compacte, au toucher très velouté, rappelant celui du satin. Une grande pureté dans l’expression aromatique des saveurs et dans les sensations de rôti, un centre à la fois fin et dense, qui exprime parfaitement la nature du sous-sols calcaire, les saveurs sont mises en exergue par une remarquable acidité sous-jacente qui étire la longue finale, intense, au dessin épuré, et intensément parfumée par un kaléidoscope d’arômes d'une grande séduction, des notes de curry et de safran persistent en ultime sensation. Noté 18+
Les accords
Bien que les accords de texture n’aient pas été recherchés, il en est un qui m’a paru évident, c’est celui obtenu avec le carpaccio de Saint Jacques et Climens, les textures extrêmement veloutées du coquillage et du vin s’épousaient harmonieusement, avec, en plus, un jeu de saveurs séduisant entre le jus frais de la mangue du plat et les mêmes accents du vin, le curry et le safran du vin élargissant le spectre aromatique du plat.
Il fallait un plat, assez vigoureux dans son expression aromatique, pour ne pas s’en laisser compter par la richesse et l’exubérance de Rabaud Promis. Le ris de veau à la texture plus lâche que celle de la noix de Saint Jacques se mariait bien avec un vin au centre plus large que serré, la puissance du nougat à l’ail a évité que le Sauternes n’écrase le plat, l’accord a fonctionné convenablement.
Le choix de conserver des fruits frais et croquants dans la conception des desserts a contribué à ajouter une dimension acide à celle du vin, la poire et l’orange apportant une tension supplémentaire à celle du Rabaud Promis, et une excellente sensation de fraîcheur à l’ensemble.
La poêlé de kaki et de mangue au sirop de miel, et espuma d’amande, est un mets complexe et délicat. Le vin le plus fin, le plus dense, le plus velouté (Climens) a joué avec ce plat une partition pleine de subtilité et d’élégance, le vin et le mets se répondant avec beaucoup de verve et de jubilation, comme peuvent le faire, dans un exercice de style, deux être se connaissant parfaitement. Un très bel accord.
Daniel