Virgin
5 Octobre 2009
2,5/5
Love 2 peut facilement être considéré comme l'album synthétisant la discographie du duo versaillais : on y retrouve le romantisme frenchy de Moon Safari (Love), le psychédélisme aventureux de 10 000 Hertz Legend (Do The Joy), le virage pop de Talkie Walkie (Missing The Light Of The Day), et le nappage sucré et agaçant exploré par Jean Benoit Dunckel en 2006 sur son album solo (Sing Sang Sung). Et paradoxalement, on sent en eux une volonté claire de dynamiser les compositions pour les détacher du concept « zen » du précédent Pocket Symphony (avec un rythme motorik soutenu sur près de la moitié de l’album). Si on est d’abord impressionné par l’excellent travail de production (la mise en espace et la diversité des sons utilisés impose le respect, un mélange unique d’instrumentation vintage à de l’électronique moderne) et l’homogénéité des ambiances, on est assez vite lassé par la manque d’épaisseur des compositions. Il manque de vraies chansons mémorables, tout simplement. Malgré le gros travail de recherche esthétique qui s’en dégage, elles sont soit trop répétitives, soit trop brèves ou inachevés (une utilisation presque constante du fade out). J’attends plus d’un album entièrement produit par le duo, seul dans son propre studio. Love 2 marque la fermeture d’une boucle pour Air (15 ans, 6 albums studios, un groupe qui tourne en rond), et peut être le début d’une toute nouvelle orientation (je l’espère !) avec, selon les dires de Nicolas Godin, un album plus expérimental pour la suite.
True Panther Sounds
22 Septembre 2009
3,5/5
Avec ses airs de rock de branleurs indie (une voix très nasillarde et une nonchalance généralisée), j’ai d’abord eu du mal à comprendre comment un groupe pareil a pu faire autant parler de lui en 2009. En fait l'attrait de Girls repose beaucoup sur la personnalité du chanteur Christopher Owens, dont l’histoire tragique (racontée en interview, et retranscrite un peu partout sur les blogs) se fait facilement ressentir. Sa façon très touchante d'exposer à cœur ouvert ses douleurs et ses déceptions par des paroles simples en fait un personnage immédiatement charismatique. La réussite de l’Album tient aussi beaucoup à la production de Chet "JR" White, qui à partir des textes et des accords de Christopher Owens a su revisiter quelques grands classiques du rock en 12 chansons codées. Cet exercice de style synthétique (on y croise le rockabilly d’Elvis Presley, la pop solaire des Beach Boys, le shoegaze de My Bloody Valentine, le cool rock de Pavement) évite le passéisme vain de beaucoup de groupes actuels (la vague revival Post Punk à la The Editors, le néo Krautrock à la française) car il est profondément incarné par une âme sensible exprimant un spleen adolescent avec une rare efficacité rock.
Drag City
14 Septembre 2009
4/5
Depuis le Japon où il est en exil artistique depuis plus de 9 ans, Jim O’Rourke (ancien membre de Sonic Youth, producteur majeur, multi-instrumentiste et expérimentateur de renom) continue sa série d’albums pour le label Drag City avec cette symphonie de chambre de 40 minutes (guitare acoustique, piano, batterie, basse, tambourin, banjo, claviers). Pour les oreilles non averties, il est difficile de s’accrocher à The Visitor, long voyage poétique qui multiplie les changements imprévus de registres et oublie plus que jamais les schémas habituels en 4/4 de la pop. C’est de loin l’album le plus exigeant de la série, et il faut s’accrocher pour ne pas perdre ses repères au milieu des nombreux trous d’air. On a perdu l’hypnotisme onirique de Bad Timing (avec lequel il forme une sorte de dyptique), mais l’impression d’écouter quelque chose d'infiniment précieux perdure longtemps. The Visitor est un disque dont on n’est jamais réellement sorti, jusqu’à la résolution de son énigme.
Matador Records
22 Septembre 2009
3,5/5
De toute la vaguelette Shitgaze (un esprit Do It Yourself poussé à l’extrême et qui repose sur un enregistrement sale avec du matériel d’amateur, une non-production et une spontanéité qui frise souvent l’imposture, voir l’article écrit par C'est Entendu), les Times New Viking sont de loin les plus doués et les plus sincères. Car contrairement à Wavves, Japandroids ou No Age, qui cachent l’ineptie de leurs compositions derrière la posture d’une production crado, eux savent écrire des mélodies entêtantes. En faisant abstraction de l’a(nti) production shitgaze, l’essentiel fait surface : les Times New Viking écrivent des chansons pop géniales et addictives (refrains dissonants chantés en chœur, guitares déglinguées, batterie métronomique, petites boucles de claviers sautillantes). Ils n’y vont pas par quatre chemins et foncent droit dans le mur en visant juste, comme si la radicalité du Velvet Underground rencontrait l’immédiateté pop de Blur. Born Again Revisited ne révolutionne en rien la musique, mais il est mené par des types à forte personnalité qui n'ont pas d'autre ambition que de concocter une injection jouissive de tubes frappadingues.
François.