Le fait que l’anniversaire de la chute du mur de Berlin tombait cette année un mercredi m’a procuré la satisfaction, pour une fois, de devancer Le Canard enchaîné. Celui-ci a ainsi décerné aujourd’hui en première page son mur du çon à un propos que, comme Zorrodeconduite, j’avais relevé récemment : Nicolas Sarkozy, Président de la République française, a conclu en allemand son discours à Berlin ainsi : « Wir sind Brüher, wir sind Berlin ! (nous sommes bouillons, nous sommes Berlin). »
Ceci m’amène à revenir sur la phrase prononcée en Chine le 6 janvier 2007 par Ségolène Royal, alors candidate socialiste à l’élection présidentielle : « Qui va sur la Grande Muraille conquiert la bravitude ». Je ne suis pas spécialement fan de Madame Royal, mais il me semble que tout esprit impartial devrait s’étonner de la différence d’écho suscité par ces deux maladresses. Analysons en effet les circonstances de chacune d’entre elles.
Il arrive à chacun d’entre nous, lorsqu’il parle, de buter parfois sur un mot et de le chercher désespérément. Ce qui nous conduit alors à recourir à des mots joker comme truc ou machin. Il faut reconnaître que la trouvaille de Mme Royal n’était pas d’une grande qualité mais, comme je l’avais signalé dans un billet vieux de plusieurs mois, d’autres mots, forgés eux par notre Président, comme héritation substitué à héritage, n’ont pas connu la même faveur. Tandis qu’innombrables sont les moqueurs qui s’évertuent à créer des néologismes ave le suffixe itude.
Si on peut considérer ce mot comme incongru, il convient cependant d’apprécier la portée de cet écart. Celle qui s’exprimait était la présidente du Conseil général de la région Poitou-Charentes, la candidate socialiste à la Présidence mais assurément pas la représentante de la France. Il en va tout autrement du ridicule de Berlin.
Voilà un homme pour lequel on écrit des discours, qu’il ne prend d’ailleurs pas la peine de toujours lire avant de les prononcer. Il dispose sans doute d’un coach pour lui enseigner quatre mots d’allemand : wir, sind, Brüder, Berliner mais il s’avère malgré tout incapable de les répéter correctement même avec le support d’un texte écrit. On peut nourrir des doutes sur sa capacité à diriger un grand pays comme le nôtre. Selon moi, cela, ajouté à ses pertes de sang-froid verbales, le disqualifie irrémédiablement pour sa fonction. A Berlin, aux yeux des Allemands, il nous a couverts de ridicule. J’en viens à ma question :
Comment se fait-il que, dans leur immense majorité, les médias ont su se répandre à loisir sur la bravitude ségoliste mais occultent aujourd’hui totalement le bouillon berlinois ?