La dent de sagesse en passe d'être (enfin) réhabilitée

Publié le 19 novembre 2009 par Estelle36

Dernière modification le 19-11-2009

Par Estelle Vereeck, Docteur en chirurgie-dentaire, auteur d'ouvrages sur les dents


Tandis que la politique du nouveau président des États-Unis en matière de recherche médicale donne un nouvel élan aux travaux sur les cellules souches embryonnaires, le monde médical découvre l'intérêt de conserver les dents de sagesse à des fins de régénération tissulaire ou d'organes perdus.
Considérée jusqu'à présent comme un reliquat de l'évolution, un organe désormais inutile et encombrant, juste bon à finir à la poubelle après avoir été extirpé de la mâchoire par le scalpel du chirurgien, la dent de sagesse est en passe d'être (enfin) réhabilitée.
Dent de sagesse, vice-dent de l'humanité
Dans un article1 au titre prometteur de "dent de sagesse, future troisième vice-dent de l'humanité", des chercheurs chinois de l'École de stomatologie de l'Université de Tongji, Shanghai*, affirment que, si les dents de sagesse sont fréquemment extraites pour diverses raisons (carie, infection, orthodontie, etc.), elles représentent néanmoins un capital de "tissus autologues pour la régénération des tissus dentaires qui pourraient remplacer des dents perdues et pourraient constituer une alternative essentielle aux traitements actuellement disponibles".

La dent de sagesse est quelque sorte un kit de régénération tissulaire gratuit dont dispose tout individu*. C'est sans doute ce qu'il faut entendre dans l'expression "troisième vice-dent de l'humanité".
* exceptées les personnes chez qui les germes des dents de sagesse ne se forment pas (on parle alors d'agénésie).
Dent de sagesse, banque de cellules souches

Les auteurs vont même jusqu'à suggérer très sérieusement que les germes des dents de sagesse pourraient être placés dans une banque de cellules souches embryonnaires afin d'y être stockés (comme cela se fait déjà pour les cellules du cordon ombilical), en attendant que les technologies d'ingénierie tissulaire permettent de les utiliser pour restaurer les dents manquantes.

Il est probable que dans un avenir proche les cellules souches issues des germes des dents de sagesse servent également à traiter des maladies aujourd'hui incurables comme le diabète ou encore la maladie de Parkinson. D'ores et déjà des expériences prometteuses chez l'animal laissent entrevoir de sérieux espoirs dans ce sens.
Dent de sagesse, halte aux extractions abusives

Il est par conséquent grand temps d'inciter dentistes, orthodontiste et stomatologues à plus de modération dans l'extraction des dents de sagesse, extraction dont les indications sont limitées à des cas précis* et souvent posée de manière abusive.
L'extraction d'une dent de sagesse (incluse, enclavée ou en place) répond à des indications cliniques précises. Une dent incluse, c'est à dire sans contact avec le milieu buccal, doit être laissée en place si elle ne provoque aucun symptôme.
* Indications d'extraction des dents de sagesse: voir le Pratikadent, rubrique Dent de sagesse.
Référence bibliographique
1 Zou D, Zhao J, Ding W, Xia L, Jang X, Huang Y. Wisdom teeth: Mankind's future third vice-teeth? Med Hypotheses. 2009 Sep 16.