Le catalogue édité en parallèle de
l’exposition Bénédicte Hébert ne se réduit pas à un simple recueil des photos
que l’on pourra venir admirer, à partir du 27 janvier 2009, à la galerie
Christophe Gaillard ou au Centre d’Art Contemporain de Caen (depuis le 17
janvier). C’est un véritable livre. En regard des cinquante œuvres de l’artiste
reproduites en pleine page, le texte de Benoit Casas invite le lecteur à saisir
toute la teneur d’un travail intimiste. Benoit Casas joue le jeu de Bénédicte
Hébert en nous conviant à la lecture – contemplation sur une apostrophe
« ça vous regarde », mais nous y introduit progressivement avec poésie en
déroulant son récit de strophe en strophe comme sur des pas japonais. L’incipit
plante le décor et nous invite d’emblée à considérer le musée comme un lieu de
vie, d’aventures, d’événements « il s’y passe de drôles de choses ». Nous
pénétrons ensuite dans les salles et les couloirs sur un effet de travelling
avant, avant de découvrir l’action : « un spectateur s’arrête ».
L’artiste en mission, autre anonyme du musée cachée derrière ses initiales,
procède alors à la « saisie de face-à-face ». La sensualité du travail de
Bénédicte Hébert est développée tout au long de l’expérience littéraire de
l’œuvre, l’auteur parle d’ailleurs « d’effeuillage des regards »
quand il décrit le procédé de mise en abîme, ou encore de « corps à corps
», il n’hésite pas non plus à en franchir les limites en invoquant le
« peep show ». On découvre que Benoit Casas n’est pas avare non plus de
prose discursive si nécessaire (le langage métaphorique utilisé lui donne
néanmoins la légèreté de l’humour sans porter atteinte à la crédibilité du
discours) lorsqu’il nous explique pourquoi la démarche de Bénédicte Hébert
n’est pas « photographier dans un champ des vaches qui s’arrêtent pour
regarder passer un train ». Il s’agit de tout autre chose, et de révéler, entre
autres, que l’art exerce une force active, visible, atemporelle. En fin de
catalogue, le texte du critique Yann Ricordel situe Bénédicte Hébert dans une
histoire de l’art plus générale et souligne l’originalité de sa démarche. En
repérant une confrontation entre deux medium dans la même image, il définit le
travail de Bénédicte Hébert comme un « acte de regard ». Cette dynamique
est rendue par l’effet de plaquage du spectateur sur la peinture ainsi que le
surcadrage qui fait que le tableau déborde le cadre photographique : le
regard est concentré sur le détail, et c’est bien cela qui permet à la
photographie de Bénédicte Hébert de dégager autant de sensualité.
Le catalogue d'exposition est en vente à la Galerie Christophe Gaillard