Jeudi dernier, vers 10h30, zone d’activité « La fistule » dans la banlieue parisienne, une société de consulting en ressources humaines, « Pôle Emploi », procède à une distribution gratuite d’argent sur la voie publique. Le slogan : « Nous soutenons la consommation des ménages ». Des centaines de badauds se pressent devant les portes de l’établissement pour profiter de l’aubaine. Quand soudain c’est le drame. Vers 11h27, la distribution est interrompue pour cause de pause déjeuner. La foule s’énerve. Bousculades, cris, injures.
Des badauds se pressent chez Pôle Emploi pour quelques billets
La déception rend amer. Adieu écran plat, ordinateur portable, sorties au cinéma et vacances à Avoriaz. Un homme, désespéré, hurle : « J’étais convoqué à 11h45, sale pute ». On crache sur les vitres, on met des coups de pieds dans les barrières, on arrache l’enseigne de l’entreprise et on fait caca dans la boîte aux lettres. Micheline V. se présente devant les émeutiers pour expliquer l’annulation brutale du happening : « Permettez qu’on aille bouffer ? ». Des paroles maladroites qui ne font qu’exciter la cohorte des désappointés. On se disperse par petits groupes pour aller porter atteinte à l’ordre public et casser la récession positive : les émeutiers, en grappes, vont s’affaler dans leurs canapés et jouer à la Playstation toute la journée en fumant du mauvais shit de table. Près de 0.18% de PIB perdu selon nos estimations : les poils de Christine Lagarde perdent de leur brillance. C’est la catastrophe.
On entend d’ici les crypto-marxistes de base, prendre la défense de ces délinquants : « comprenez, c’est la crise, alors les gens se ruent vers l’argent facile ». Les gens, les gens, c’est vite dit : dans la foule des casseurs de l’économie, on ne trouve pas beaucoup de catholiques. D’ailleurs, n’est-ce pas le Président lui-même qui, en définissant si brillamment l’identité nationale, nous explique que le bon Français, lui, préfère exercer les fonctions de préparateur de commande à bac +5 plutôt que d’attendre qu’on lui jette le fric depuis les fenêtres de la première société à faire dans l’événementiel outrancier ? Le bon Français à autre chose à faire que d’attendre après une opération publicitaire de masse.
Si vous aviez distribué du pinard, ça ne serait pas arrivé
Certes, il est vrai qu’il est dans la nature humaine d’être prêt à tout pour un peu d’argent facile. Et l’effet de groupe dans ce genre d’occasions provoque bien souvent des manifestations incontrôlées de sauvagerie collective. Ceux qui ont fréquenté les concerts de Madonna peuvent en témoigner. M. Panel lui-même, impliqué dans une sombre affaire d’éviscération d’un spectateur avec les dents, ne doit son salut qu’à la mansuétude intéressée d’un substitut du procureur dans la poche duquel il a glissé la culotte litigieuse. Mais quelques errements de ci de là ne sauraient justifier un comportement répété. Oui, répété. Car d’une part la société Pôle Emploi organise ces opérations publicitaires presque quotidiennement, et d’autre part ce sont toujours les mêmes qui y participent.
Du reste, ces abjectes pratiques contraires à toute morale mettent en péril la distribution légitime de pognon sur la voie publique, celle qui profite à l’économie. Elles jettent le discrédit sur d’autres happenings nécessaires au bon fonctionnement de notre modèle social, comme la rediffusion de l’argent du contribuable vers les entreprises privées ou les banques, qui elles en ont réellement besoin pour faire des choses très importantes, comme nous sortir de la crise dans laquelle l’assistanat nous a plongés.
Conscient de cette réalité, le gouvernement a décidé de sévir. Brice Hortefeux va « présenter la facture » au Pôle Emploi, qui pourtant assure avoir toutes les autorisations nécessaires – ce que l’enquête devra déterminer - et souhaite que ce type d’évènements illégaux soit plus durement sanctionné. Espérons qu’il soit entendu et qu’à l’avenir on ne puisse plus tout faire aux fins de publicité.