Je ne sais pas pourquoi - peut-être les beaux jours d'automne, mais je n'avais plus très envie d'aller au cinéma. Et puis soudain...
J'ai vu Rien de personnel dans mon petit cinéma. Une histoire de grande soirée dans un musée pour cadres à évaluer, et puis une rumeur court : et si les exercices n'étaient pas innocents et masquaient le besoin de savoir de " quels collaborateurs se séparer " ? Il y a là un cadre vieillissant apparemment dépressif, une secrétaire au mari " extérieur à la profession ", une jeune cadre heureuse en ménage avec un employé de la même entreprise, un délégué syndical, un patron dandy et un balayeur dont le contrat vient de s'achever. Entre eux vont se créer différents rapports, de force ou de complicité. Au final, les plus forts et les plus généreux ne sont pas ceux que nous croyons... Il s'agit d'une étude intéressante sur la pression de l'entreprise sur la vie privée (nous avons là deux couples et le film montre qu'il faut choisir à qui on va être le plus fidèle : son boulot ou son amour ? épisode glaçant) ; mais l'ensemble souffre d'une construction artificielle. Le récit de la soirée se fait en trois temps, pour nous montrer que d'abord nous nous étions laissé abuser par les apparences. C'est évidemment une façon de redoubler les manipulations et le voyeurisme de la soirée mais ça amène à voir certaines scènes deux fois - trois fois... Une coquetterie tout de même. Coquet également, mais plus habile, le dévoilement progressif du décor pendant le générique : des écorchés qu'on illumine avant de laisser entrer les invités... métaphore de cette mise à nu qui va avoir lieu ensuite.
Ensuite, j'ai vu Mary et Max, une histoire de correspondance entre une gamine australienne aux parents épouvantables et à la vie morne, et un quarantenaire américain atteint d'une forme d'autisme. Elle a tiré son nom au sort dans le bottin, il est incapable de gérer le caractère physique d'une rencontre mais se révèle un épistolier formidable, conseillant Mary lorsqu'elle lui demande de l'aider à repousser les moqueurs et, surtout, à découvrir le mystère de l'amour... Le problème : si Max est sensible à la pollution et incommodé par la séduction, il est aussi en quelque sorte " allergique " aux lettres de Mary dont les récits le confrontent à ses pires souvenirs d'enfance... Au début, on sourit de la présentation farfelue des deux personnages, de leurs petites manies, puis la noirceur et le mal-être s'installent et on est ému aux larmes des ratés et des joies de cette amitié hors des sentiers battus, des ces rendez-vous manqués entre ces deux êtres souffrants. Un très beau film.
Enfin, Fish Tank. Une ado agressive dans une banlieue moche (sa famille : un univers féminin, où l'on se traite de bitch pour ponctuer la conversation, une mère immature qui aimerait se débarrasser de ses gamines indomptables, histoire peut-être aussi d'arrêter le temps...). Mia rêve de danse, survient Connor, le nouvel amant de sa mère. Il ne se laisse pas démonter par ses provocations, et pourrait même réussir à l'amadouer et à lui apprendre l'abandon... J'ai adoré voir ce film et discuter la fin jusqu'à pas d'heure avec **D** comme au bon vieux temps. Le scénario est une merveille de précision et n'hésite même pas vers la fin à nous semer un peu, au rythme d'une errance dont on a du mal à voir l'issue. Et l'héroïne (et l'actrice qui l'incarne) est formidable, butée mais toujours en mouvement, pleine de fureur et d'audace. Un magnifique portrait de jeune fille (en cheval sauvage, telle qu'elle imagine la vieille bête des nomades installés sur une terrain vague, et qu'elle finira par remplacer. Résignation ou maturité et sagesse du départ ?).