La Mairie de Paris n’a fait attendre ni le public, ni la presse, pour faire savoir, dans un communiqué daté du 12 novembre, que : « En ce qui concerne l’Hôtel de Rosimond, siège actuel de l’association- société du Vieux Montmartre et son Musée - et l’hôtel Demarne attenant, la Ville propose également de lancer, dans les mois suivant la fin d’activité, un appel à projets privés pour la reprise des lieux. Ces projets devront présenter une dimension culturelle, en lien avec l’arrondissement. »
Pourquoi donc chasser une association « privée » comme le « Vieux Montmartre » et présentant « une dimension culturelle, en lien avec l’arrondissement » pour caser un organisme tout aussi « privé » et devant accomplir la même mission culturelle ? Mystère…
Angle rue Saint Vincent et rue du Mont Cenis… Autrefois!
Mystère ? Oh, pas vraiment, on peut penser, comme votre serviteur, que ces merveilleux bâtiments une fois vidés de leurs occupants, la Ville de Paris se chargera de laisser filer la situation, négligeant tout entretien des locaux – comme elle en a la détestable habitude – et que ces lieux, une fois dégradés, peut-être squattés, seront alors mis en vente. Le prix du mètre carré justifiera alors cette cession à des promoteurs, qui feront de ces bâtiments un carré réservé pour propriétaires chanceux, « typical of Mountmartreux ».
Fi de la dimension culturelle du Musée de Montmartre ! Quelle dimension culturelle ? Quoi ? Carco, Dorgelès, les impressionnistes, Renoir, Le Moulin de la Galette, et même – même ! – le Sacré-Cœur ? Connais pas…
Le grand problème dans cette histoire semble être, une fois de plus, l’ignorance de certains décideurs qui n’ont, probablement, jamais posé leurs augustes pieds sur le sol de la Butte. Ils croient peut-être que Montmartre se résume à la place du Tertre et à tout son attirail de souvenirs « made in China » ? Un reportage diffusé la semaine dernière sur une chaîne de télévision montrait les nombreux peintres chinois chargés de barbouiller des toiles « authentiques » figurant les coins les plus célèbres de la Butte…
Depuis toujours, le Musée de Montmartre forme justement, une sorte de « contrepoids » à toute cette marée touristique de pacotille. Pour qui veut la véritable – et passionnante – histoire de ces lieux, il suffit de pousser la porte de la rue Cortot. Là, les parisiens, les provinciaux, et les touristes, bienvenus, peuvent appréhender la véritable dimension artistique et spirituelle de Montmartre.
Une mauvaise gestion est reprochée aux administrateurs du Musée. Ah ?
Pourtant, et je cite la réponse à la dépêche envoyée par ces mêmes administrateurs : « La Mairie, en tant que membre de droit, est titulaire de 4 sièges à notre Conseil d’Administration ; or les réserves sur la gestion, exprimées aujourd’hui, n’ont jamais été formulées en Conseil. »
Dans le même temps, la Mairie refusait d’accroître sa subvention, modeste, de 40 000 € plus la compensation du loyer qui est dû à la Ville.
Un peu légère, cette Mairie de Paris qui, courant 2009 fit trois propositions successives contradictoires :
En février, devant la situation financière difficile : « Procédez à une liquidation judiciaire ».
En mars : On va vous aider (report du paiement du loyer) et étudier une solution pour pérenniser le Musée : gestion déléguée, transformation en Musée municipal ou augmentation de la subvention.
Et enfin fin octobre, après sept mois de silence : On vous coupe les vivres, donc nous vous suggérons une dissolution volontaire.
Un grand numéro de danse administrative, digne des plus beaux cancans Montmartrois !
Pourtant, pourtant, dans le communiqué de presse cité plus haut, la Ville se dit prête « à reprendre à tout moment contact avec l’Association pour étudier un plan de redressement sérieux ».
Pourquoi cet énervement, alors ? Mettons-nous autour d’une table et discutons, comme l’écrivent les responsables du Musée : « Si ce plan devait passer par la solution du repreneur privé, avec la clause de dimension culturelle qu’elle évoque, l’Association le Vieux Montmartre serait d’accord pour incarner cette référence culturelle avec ses collections et son Musée classé Musée de France. »
La mémoire des lieux, la littérature, la peinture et toute la foule des oubliés de la Bohême exigent que nous fassions le nécessaire, voire l’impossible, pour sauver une fois de plus ce lieu magique et magnifique : le Musée de Montmartre.
Rodolphe Trouilleux
Les petites gens du Maquis de Montmartre