Dans un cadre plutôt modernisant, bois-blanc-rouge, un peu quelconque mais qui a au moins le mérite d‘être sobre, une dizaine de tables montent la garde en rang d’oignon. Les assiettes blanches sont posées à même les plateaux de bois : esprit bistrot es-tu la ?
Un vieux comptoir décapé posé contre un mur délimite le territoire des propriétaires. Un tout petit territoire, dans un tout petit pays, le pays du printemps. Dehors il fait nuit et froid, au dessus des tables, un halo violet descend du plafond, comme un crépuscule discontinu et artificiel, fabriqué par EDF.
La carte est courte : 3 entrées, 3 plats, 3 desserts. Le menu du soir est à 42 Euros, soit l’équivalent de 4,3 menus maxi best of chez le gros Ronald, le clown qui fout la trouille avec ses cheveux rouges et son maquillage de psychopathe. Un excellentissime rapport qualité prix (le menu du soir pas le maxi best of).
Des cèpes en raviolis dans un bouillon gourmand, un saint pierre nageant paisiblement au milieu de petits légumes croquants, de la châtaigne en velouté, un topinambour émulsionné, un bœuf qui tend la joue perché sur sa pomme de terre fondante, un foie gras aiguisé comme une lame, un chutney à l’orange pointu comme un couteau. Rien n’est laissé au hasard, tout est ultra précis, beau, gouteux, généreux. 10/10, mention très bien, avec les félicitations du jury.
Ce n’est pas une histoire de technique, ni de business, ni de produits. C’est une histoire d’amour du travail bien fait, d’envie, de partage, de respect du client.
Une fraicheur de jeunes premiers émane de l’établissement, leur entrée en scène est remarquable. Ils méritent le Goncourt des fourneaux, le Pulitzer des marmites, le Molière des cocottes.
Dans ma rue, c’est tous les jours le printemps.
La Fourchette du Printemps – 30, rue du Printemps – 75017 Paris – 01 42 27 26 97