Selon l’approche Socratique, prolongée par Platon, le corps est un poids pour l’âme. Il la détourne de ses aptitudes à découvrir la vérité. Les sens, l’affectivité, l’expérience, l’inscription dans le temps et dans l’espace sont autant d’avatars contrariant une âme qui originellement est en mesure de saisir l’absolu.
« L’âme ne raisonne jamais mieux que quand rien ne la trouble, ni l’ouïe, ni la vue, ni la douleur, ni quelque plaisir, mais qu’au contraire elle s’isole le plus complètement en elle-même en envoyant promener le corps et qu’elle rompt, autant qu’elle le peut, tout commerce et tout contact avec lui pour essayer de saisir le réel. » Platon – Phédon
Si l’on considère que la mort sépare l’âme du corps en vouant ce dernier au pourrissement, la philosophie, dont l’objectif est de découvrir la vérité de son vivant, prépare cette séparation. Elle est donc en quelque sorte un apprentissage de la mort. Sans aller jusqu’à envisager cette préparation mortuaire, le message de Platon est intéressant s’il n’est pas interprété au pied de la lettre. Il peut s’agir d’un conseil bien plus utile au quotidien et qui serait le suivant : il est nécessaire que la raison l’emporte sur la passion dès lors qu’il s’agit de comprendre ce qui est, pour ensuite agir adéquatement aux situations qui occupent notre vie. Il ne s’agit pas de mépriser le sentiment, voire de l’annihiler. La vie sans souffle du cœur et du corps ne mériterait pas que l’on s’y attache. Mais la raison doit rester maîtresse chez elle. Se laisser guider uniquement par ses instincts et ses affects emprisonne l’existence dans une conduite qui ne serait soumise qu’à l’éphémère et au périssable. La raison est seule capable de gouverner justement et librement l’existence. Pourquoi pas alors l’énoncé suivant : philosopher c’est apprendre à vivre.