Lorsque mon ami Antoon m'a proposé de passer un week-end à Cognac incluant une visite à la tonnellerie où il travaille, j'ai accepté de suite. Lors de mes visites à Haut-Brion et à Margaux, j'ai vu un tonnelier en action, mais je n'ai jamais vu l'ensemble du processus qui part de l'arbre jusqu'à la barrique.
Or l'une des spécificités de Vicard, c'est justement de maîtriser l'ensemble de la filière. Le stock de grumes est impressionnant, et l'on se sent tout petit à côté des ces piles de troncs de chêne.
Afin de conseiller au mieux la clientèle, Antoon est passé par tous les postes de production. Il est donc capable de repérer de suite les qualités ou les défauts d'un chêne. Celui qu'il me montre a des irrégularités de croissance (son coeur est excentré). De ce fait, les écarts entre les cernes d'accroissement sont variables. Il sera possible de tirer de cet arbre plusieurs qualités de douelles: très fin, fin, voire gros.
La grume est d'abord coupée à une longueur correspondant à celle du fût qu'elle permettra de fabriquer (elle devient un billon). Puis celui est fendu en quartiers . Eux-mêmes recoupés ou fendus...
... pour arriver au merrain.
Celui-ci est scruté attentivement pour être classé dans l'une des quatre catégories : très fin, fin, mi-fin ou gros. Puis il est posé soigneusement sur une pile pour être séché.
Chaque pile est identifiée avec un code-barre permettant de savoir à tout moment l'origine et la qualité du bois. La traçabilité se poursuivra jusqu'à chaque barrique.
Puis elles sont placées deux par deux sur l'aire de stockage à l'air libre pour une durée de 24 à 36 mois selon le bois. Celle-ci fait 6 hectares (et bientôt 8).
Après séchage, le bois est placé dans une cellule de stabilisation afin d'éliminer l'humidité résiduelle puis est raccourci, arrondi, légèrement creusé : le merrain devient douelle.
Lors de la découpe de la grume en merrains, il y a 75% de perte. Les matières les moins nobles alimentent des chaudières pour chauffer les différents locaux, mais aussi l'eau pour le cintrage des barriques. Les plus nobles sont destinées à être transformées en papier. Lorsque le merrain est usiné en douelle, il y a une perte de 10% environ. Le bois récupéré est transformé en granulés qui servent à la chauffe des barriques.
Je ne peux vous montrer la fabrication de la barrique, car je suis venu le vendredi après-midi. Et avec les 35 heures, les tonneliers ont fini leur semaine à midi... Néanmoins, voici une video montrant le cintrage et la chauffe des barriques.
Je ne sais pas si vous avez tout compris ce qui est sur le film. Je vous redétaille les spécificités de la "méthode Vicard".
Les barriques sont cintrées en moins de 5mn à la vapeur. Cette méthode moins agressive que l'habituel feu permet de ne pas brûler inutilement la barrique mais aussi un pliage du bois avec moins de risque de "casse".
La chauffe elle-même se fait dans un caisson qui évite la déperdition de la chaleur. La barrique tourne en permanence autour du feu afin d'avoir la meilleure homogénéité possible. Le feu lui-même est à base de granulés de chêne qui dégagent une chaleur homogène. La température à l'intérieur de la barrique est contrôlée toutes les 1/10 de secondes. Si elle augmente au-dessus du plafond autorisé, de l'eau est brumisée à l'intérieur de la barrique pour éviter tout risque de surchauffe. Lorsque la moitié du temps de chauffe est atteint, la barrique est retournée afin d'avoir la meilleure homogénéité possible.
On comprend mieux pourquoi la chauffe est parfaitement homogène à l'intérieur des barriques. On a l'impression qu'elles ont été passées à la lasure...
Une autre spécificité de Vicard est l'assemblage des fonds sur le principe des lames de parquet. Une fois les pièces de fond montées, une forte pression est exercée afin d'assurer une bonne cohésion.
Ils peuvent être ensuite découpés à la forme définitive.
Le joint d'étanchéité des fonds (que l'on aperçoit légèrement sur la photo) est tout simplement de la pâte formée de farine et d'eau. Qui l'eût cru?
C'est presque fini...
On peut alors mettre des jolis cercles ...
Rajouter les cercles de châtaignier, graver la barrique au laser
Et on emballe...
En oubliant pas de mettre le mode d'emploi ;o)
Eh bien voilà, on a fait le tour. J'ai pu ensuite discuter avec les frères Vicard qui sont vraiment sympathiques et d'approche très facile. On sent vraiment la maison familiale !
Merci à eux et à Antoon pour cette belle visite. J'aurais appris beaucoup de choses.
Pour voir une méthode plus artisanale, voir ICI.
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