Entre les lignes 2

Par Headless

Que penses-tu des séries en plusieurs épisodes ?


Qu'une série est toujours en plusieurs épisodes.


(NB : J'ai fait mes armes à 11-12 ans avec toute la collection ésotérique de ma mère, Lobsang Rampa perce le troisième oeil à la chignole, Lobsang Rampa découvre l'Atlantide... ça stimule l'imaginaire, c'est bien pour apprendre à lire mais faut vite dépasser ce stade sinon on finit par ouvrir un Ashram pour moutons dans l'ardèche.
Sinon merci Hergé, Peyo et cie. C'est la loi des séries : miracles et catastrophes.)


As-tu un livre culte ?

Il y en a peut être un qui dépasse tous les autres pour moi. Je pense au Journal de Kafka parce qu'il témoigne de l'effort insensé de son auteur pour tenir sur une ligne raide (que pas une journée ne passe sans qu'une ligne d'écriture ne soit braquée sur moi) par amour exclusif pour l'art. Et ce qui n'était pas littérature au départ ( plutôt des impressions quotidiennes, notes, défouloirs, automotivation) devient une oeuvre à part entière.
Puis le Chateau, puisque Kafka malgré lui a fait là un livre infini (par son propos et par le fait qu'il est resté inachevé - c'est son dernier ouvrage). Un work in progress, une oeuvre ouverte (comme dirait Umberto Eco).
Le dépeupleur de Beckett, pour la noirceur de sa métaphore ("tout n'a pas été dit et ne le sera jamais", "chacun cherche son dépeupleur"). Ulysse de James Joyce pour sa tentative titanesque et son érudition parasitée (imbuvable dans son intégralité mais regorgeant de pépites dans le détail).
Le Parzifal de Wolfram Von Eshenbach (là aussi parce que j'ai du attendre une dizaine d'année pour en trouver une traduction et qui n'est pas complète, la rareté aiguise le désir). Les chants de Maldoror de Lautréamont pour la démesure et l'aspect intemporel.
Un livre a marqué ma jeunesse, c'était un bouquin de la bibliothèque verte je crois, une version de la quête du graal contenant des illustrations réalistes en noir et blanc (on y voit Perceval avec des javelots si je me souviens bien). J'ai beaucoup rêvé sur ce livre perdu que je n'ai jamais réussi à retrouver. Mon graal en quelque sorte. Si quelqu'un me trouve ça, je lui offre un dessin avec grand plaisir!


La Philosophia Perennis d'Aldous Huxley dont j'ai déjà parlé ici est un livre incontournable en ce qui concerne l'approche d'une sagesse humaine dépouillée des particularités territoriales, religieuses et qui montre le lien qui unit toutes les spiritualités, malgré les différences apparentes. Les écrits de Maître Eckhart qui sont pour l'occident ce que sont
les écrits et entretiens de Ramana Maharshi en Inde (La métaphysique renvoie à l'universel quand les croyances et le religieux renvoie au particulier, au local).
Pour la bande dessinée : Fable de Venise, parce que des amis à mes parents me l'on offert pour mes 11 ans et que ce bouquin que je trouvais mal dessiné à l'époque s'est transformé à mes yeux en summum de l'élégance. J'ai grandi avec lui. De même que j'ai grandi avec le tome 1 et 2 de "l'art de la BD", un grand classique chez les dessinateurs.
Plus tard Maus de Spiegelman.
A 17 ans Akira que j'ai acheté en kiosque (le premier manga en France).
Et une épopée graphique hallucinante : "contes démoniaques" d'Aristophane  à l'association (clairement une sorte de Lautréamont de la narration graphique), un auteur parti trop vite.
Foligatto et les premiers albums de De Crécy qui m'ont fait l'effet d'un détonateur.
Le Sfar de Pascin.
Le Blutch de plus en plus (depuis Mitchum, Péplum il ne cesse de se réinventer).
Mais cette pseudo liste ne reflète pas complètement la complexité de mes goûts.


Aimes-tu relire ?

Il faut relire. D'aillers je sépare deux catégories de livres : ceux qui dévoilent tout dans la première lecture (plutôt récréatif) et ceux qui demandent du temps pour être saisi (comme un oignon avec une succession de peaux à ôter). En plus ce n'est pas la même chose de lire telle oeuvre à 17 ans et à 35. La vie change la profondeur du regard. Et pour finir on a tendance à oublier même les choses les plus fortes, il faut réactiver les livres, les faire vivre avec soi.



Aimes-tu parler de tes lectures ?

Pas systématiquement et pas avec n'importe qui. Il faut une communion d'esprit, je n'éprouve aucune envie de convaincre l'autre de mon goût, tout ça est si personnel.