Amusant, non? On doit cet exquis détournement de l’antique Félicie à un certain Monsieur Lenuage, joli nom, que l’on tient à remercier ici, (en sortant du droit de réserve que devront bientôt observer les blogueurs culinaires en exil). Ce n’est pas tous les jours qu’on rigole à l’aube devant son ordi.
Ni le soir devant ses fourneaux, d’ailleurs (bonjour la transition). A part les jours où y mijote une effilochée de lapin au chardonnay bien roots et moelleuse. Une version acalorique autant que mégadigeste des rillettes à la papa, grâce à laquelle on a raflé le titre envié de Maître Bunny 2009 et le costume qui va avec.
Pour quatre ou cinq gulus à table, il faut commencer par s’offrir un devant et un râble de lapin, soit les deux tiers de l’animal environ, moins les pattes arrière. Lesquelles, étant sollicitées à longueur de journée pour la galopade libidineuse, s’avèrent un brin trop musclées et donc sèches pour ravir le palais. Il s’agit aussi d’acquérir aussi une demi-bouteille d’un chardonnay bourguignon de moyenne extraction (inutile de se ruiner, sans tomber dans la crouille non plus), une carotte, trois gros cornichons, quatre feuilles de gélatine et un demi-bouquet de persil.
Faites suer une échalote et une gousse d’ail hachées dans une cocotte avec une giclée d’huile d’olive. Réservez. Découpez grossièrement le lapin en morceaux, salez, puis colorez-le sous toutes les coutures dans ladite cocotte. Ajoutez échalote et ail. Tassez le tout. Mouillez à niveau avec le vin rallongé du même volume d’eau. Immergez un bouquet garni. Ou une boule à thé truffée jusqu’à la garde de laurier, romarin, thym et clous de girofle (trois max).
Laissez glouglouter doucement deux plombes et quelques, en surveillant le niveau de liquide. Le lapinou doit barboter jusqu’aux oreilles.
Taillez en brunoise cornichons et carotte. Emincez le persil.
Extrayez le lapin de son bain, laissez refroidir et effilochez du bout des doigts en virant os et cartilages; opération troublante qui, selon humeur, peut ressembler à une punition dégoûtante ou à une recréation vaguement régressive et donc voluptueuse.
Faites réduire à plein gaz le jus de moitié, voire un peu plus, en y ayant préalablement plongé les carottes et versé un demi-verre de cognac. Ajoutez les feuilles de gélatine une à une. Puis le lapin, le persil et les cornichons. Normalement la bête doit absorber quasi tout le liquide. A défaut, faites réduire encore un poil. Assaisonnez avec une certaine vigueur. Puis moulez dans une terrine et laissez rafraîchir sur le coin de la fenêtre.
Voilà, cette glorieuse compote de lapinou se sert à la cuillère, ou à la louche, avec quelques griottes au kirsch. Plus, si entente, trois poivrons rôtis en salade et deux fenouils étuvés aux herbettes. Enfin, on dit ça…
Et comme il ne faut surtout pas rester avec la luette sèche, on a dégotté dans le big boxonou de notre cave une bouteille d’altesse savoyarde vieille de 13 ans. Oui, tricotée en 1996 donc, par Monsieur Michel Grisard, vigneron savoyard visionnaire et admirable. Ben, l’aïeule pétait la forme. Parfumée à la truffe et au safran. Fraîche et tonique en bouche. Une super mémé alpine.
Seul souci: l’étiquette collée à cul par-dessus tête. Ce qui n’est pas grave, a priori. Mais pour la guigner, il peut arriver que le convive idiot retourne la bouteille et renverse donc du vin sur la table.
Et la nappe empeste.
Sarkozy…
Tchou