Un concept fabriqué de toutes pièces. Dans une question écrite adressée, la semaine dernière, au ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, Eric Raoult, colère après avoir découvert les propos de Marie NDiaye dans un entretien aux Inrocks, en appelle au «devoir de réserve dû aux lauréats du Prix Goncourt».
Au nom de quoi? «Une personnalité qui défend les couleurs littéraires de la France se doit de faire preuve d’un certain respect à l’égard de nos institutions», invoque le député de Seine-Saint-Denis, dans sa question. Et donc, selon lui, de modérer ses critiques à l’égard du président de la République ou de ses ministres.
Dans cette interview, parue le 30 août, l’auteure de Trois femmes puissantes (Gallimard), pas encore primée, qualifie la France de Nicolas Sarkozy de «monstrueuse». Son choix, il y a deux ans et demi, de partir vivre à Berlin, avec son compagnon, Jean-Yves Cendrey, également écrivain, et leurs trois enfants, «est loin d’être étranger à ça»,. «Nous sommes partis juste après les élections, en grande partie à cause de Sarkozy, même si j’ai bien conscience que dire ça peut paraître snob.» Dénonçant une «atmosphère de flicage, de vulgarité», elle juge «monstrueux», l’actuel ministre de l’Immigration, Eric Besson, et son prédécesseur, Brice Hortefeux. ajoute-t-elle
Des propos «d’une rare violence», «peu respectueux, voire insultants», s’indigne Raoult. Alors que vient d’être lancé le débat, voulu par Besson, sur l’identité nationale, voilà qui fait désordre? «Rien à voir», coupe le député. Pour lui, c’est son Goncourt, «le prix littéraire le plus prestigieux» et «regardé en France mais aussi dans le monde», qui devrait obliger Marie NDiaye à tenir sa langue: «le message délivré par les lauréats se doit de respecter la cohésion nationale et l’image de notre pays», invente Raoult. Une recommandation qui fleure la censure. Le député s’en défend: «Je suis pour la liberté d’expression la plus totale des écrivains, ce qui n’est pas la liberté de calomnier ou d’insulter.»
Il demande donc à Frédéric Mitterrand de rappeler aux primés un «nécessaire devoir de réserve qui va dans le sens d’une plus grande exemplarité et responsabilité>>