298° Quand j'entends parler de culture, je sors mon revolver

Publié le 11 novembre 2009 par Jacques De Brethmas

Lorsque Marie Ndiaye, prix Goncourt 2009 a qualifié « la France de Monsieur Sarkozy » et les gens comme Besson et Hortefeux de monstrueux, elle n'avait pas encore le plaisir de connaître Eric Raoult.

Souvent, en tentant une discussion avec un UMPiste convaincu, -j'en connais quelques uns-, je constate qu'ils ont une fâcheuse tendance à préférer une attitude partisane façon supporter de football à un vrai débat d'idées.

Il est vrai que ne fréquentant pas les milieux de la finance et du business international, je n'ai jamais affaire à des gens qui auraient de bonnes raisons de faire l'éloge raisonnée d'un régime qui a tant de bonté pour leur fortune. J'ai plutôt devant moi de pauvres disciples qui se tirent dans le pied en faisant la promotion d'un système qui les exploite à l'insu de leur plein gré, et qui récitent sans comprendre les slogans creux que le régime leur sert pour les faire défiler en rangs serrés.

On en arrive donc rapidement à des attitudes de supporters de stade bornés et irréfléchis, qui cassent la gueule à tout ce qui n'a pas la casquette aux couleurs de leur club.

Sans doute est-ce que qu'a voulu faire Eric Raoult, qui fut jadis Président local puis national des « Jeunes du RPR », une sorte de sergent recruteur dont il semble avoir conservé quelques réflexes, même si sa fidélité de bon petit soldat lui a valu d'accéder ensuite à la députation en 1986, à la Mairie du Raincy en 1995, au Conseil régional d'Ile de France en 2004, et même à la vice-présidence de l'Assemblée Nationale de 2002 à 2007.

http://www.lexpress.fr/region/le-parcours-d-eric-raoult_740485.html

photo AFP - Saget

Eric Raoult considère bel et bien Marie Ndiaye comme une sportive en la désignant dans sa vindicte comme : « une personnalité qui défend les couleurs littéraires de la France »... Le nouveau surréalisme?

Au concours de gaffes déjà brillamment inauguré par les « casse-toi pauvre con » du patron, les Auvergnats d'Hortefeux et les félonies de Besson, il faut maintenant ajouter la contribution artistique d'un Eric Raoult, dont la célébrité est un peu tardive malgré une carrière déjà bien entamée.

En 2005, il avait déclaré à l'hebdo d'extrême droite Minute que « Clichy-sous-Bois faisait honte à notre pays », et le 24 janvier 2009, en annonçant sa candidature aux régionales de 2010, « qu'il serait le porte-parole des banlieues et des hétéros ».

http://www.tetu.com/actualites/media/ric-raoult-porte-parole-des-heteros-rapporte-lecanard-14078

Ça tombe bien, je n'avait justement pas l'intention de lui confier le soin de porter ma parole, à moi.

C'est aussi lui qui a dit, à propos du réexamen des lois sur le mariage et l'adoption:

« Dès qu'il y a un enfant, il faut un papa et une maman ».

Déclaration à visée homophobe, mais surtout irréaliste: 22% des petits français vivent dans une famille monoparentale. Chef, on les laisse où ils sont ou on les envoie à l'orphelinat??

Enfin, il s'est déclaré partisan du rétablissement de la peine de mort:

http://www.liberation.fr/politiques/010118202-encore-dix-huit-deputes-pour-la-peine-de-mort

Aujourd'hui, il ne fait plus rire.

Quand un pays commence à trier ses artistes, contester leur liberté d'expression et prétendre soumettre leurs créations à sa doctrine, c'est que sa démocratie est malade et qu'il a grand besoin d'un vaccin anti-dictature.

Si Eric Raoult n'est pas immédiatement désavoué par l'ensemble du gouvernement, Ministre de la Culture en tête, alors Marie Ndiaye a bien raison de dire qu'elle se sent plus à l'aise à Berlin qu'à Paris. D'ailleurs, elle n'est pas la première à le dire.

Or personne ne se précipite pour maîtriser le forcené et le ramener dans sa mairie...

Ce pauvre Frédéric Mitterrand qui marchait déjà sur des œufs depuis son soutien à Roman Polanski et la tardive lecture d'extraits de ses œuvres par Marine Lepen ne sait plus où se mettre...

http://brethmas.blogspot.com/2009/10/289-quand-les-voyous-politiques.html

Face à une Marie Ndiaye qui lui demande maintenant avec calme et humour la même chose qu'Eric Raoult, -de se prononcer sur la liberté de création des artistes du pays dont il est le ministre-, il n'a rien trouvé de mieux que de répondre « qu'interpellé par écrit, il répondrait de la même manière ».

Mais puisque propaganda oblige, la lettre « discrète » de Raoult s'est trouvée dans la presse, servie comme argument de campagne chez les supporters du Sarko-club, il faut que la réponse trouve elle aussi, le chemin des médias!

Pauvre Frédéric Mitterrand! Ah il a cru pouvoir faire de l'art et de la culture là où on ne voulait de lui que pour toute autre chose, eh bien qu'il l'assume maintenant!

Fallait pas y aller !

De l'art à la philosophie.

Pendant que nous sommes à tresser des couronnes de lauriers aux nombreux gaffeurs du gouvernement et de l'UMP, n'omettons pas un champion de poids, au propre comme au figuré:

Alors qu'Eric Raoult exprime sa vision élevée de la création artistique, les arts martiaux portent David Douillet à la philosophie...

Vous savez, c'est celui qui a été élu de justesse au deuxième tour dans une circonscription où tous ses prédécesseurs de droite étaient passés haut la main dès le premier tour.

On ignore encore si l'œuvre philosophique du nouveau député UMP des Yvelines passera à la postérité, -je pense qu'elle a plus de chance de finir en papier recyclé-, mais le Canard Enchaîné s'est collé pour moi à sa lecture. Ça tombe bien, je n'en avais pas envie.

photo SIPA

Dans trois ouvrages fondamentaux, « L'âme du conquérant » « Notre famille recomposée » et « 110% », Douillet s'acharne à démolir l'image que nous avions de la haute pensée attachée aux cultures orientales. Et il y réussit.

Dans ce festival de propos convenus, on découvre un lien inattendu entre les tatamis et le café du commerce. Le philosophe ne nous dit pas que la place de bobonne est à la cuisine, mais il le pense très fort en termes choisis:

« Pour moi, une femme qui se bat au judo ou dans une autre discipline, ce n'est pas quelque chose de naturel, de valorisant», ou encore: « c'est la mère qui a dans ses gènes, dans son instinct, cette faculté originelle d'élever les enfants. Si Dieu a donné le don de procréation aux femmes, ce n'est pas hasard ».

Si on cherchait un défenseur du mariage homosexuel, on ne le trouvera pas dans les Yvelines... Une petite deuxième couche: « J'ai une authentique admiration pour les femmes qui vouent leur vie aux leurs »

Et le clou du spectacle, le ippon définitif: « On dit que je suis misogyne. Mais tous les hommes le sont. Sauf les tapettes. »....

C'est le propre des petits d'exorciser leurs faiblesse en déclarant que tous les autres sont à leur image. Il n'en demeure pas moins que les tapettes que je connais ont avec les femmes des relations moins embarrassées que lui.

http://bibliobs.nouvelobs.com/20091104/15693/david-douillet-naime-pas-les-tapettes

On n'est pas des pédés!

Il n'y a pas qu'en France qu'on tente avec plus ou moins de bonheur de construire un mur de la honte entre ce qu'on veut paraître et ce que les autres assument. Au Canada, dans la douillette ville de Repentigny (Québec), Monsieur Lépine, prêtre-curé de son état, organise des stages de formation pour les parents qui veulent s'assurer que leur progéniture ne va pas devenir une tapette. S'ensuit cette affiche qui gagne son entrée au bêtisier homophobe international.