Les doigts dans la serrure

Il est de bon ton de flinguer du fonctionnaire. Habile subterfuge qui permet d'oublier la lune et de regarder le doigt. D'ailleurs, c'est vers la diminution du nombre d'élus que l'on se dirige. Mais à la botte, ils sauront continuer de dénier ce qu'est le service public, dont l'arrêt de mort fut sans doute inspiré par le fameux combien ça coûte. La gestion gestionnaire faisant son irruption, se tordre le cou en comptant les sous, ne voir que les dépenses devint gymnastique partagée. On eut pu regarder les bénéficies, envisager l'investissement là où ne finit par ne voir que du fonctionnement, mais c'eut été d'autres moeurs, d'autres temps, d'autres logiques.
Revenons à notre "fonctionnaire".
Le dico est redoutable. Sens premier, en terme de droit : Agent de l'État ou d'une autre personne morale de droit public, nommé dans un emploi permanent et titularisé dans un grade de la hiérarchie des cadres d'une administration. Le sens second est plus juste, me semble-t-il : Individu investi d'une fonction.
On m'a parlé de l'un d'eux, l'autre jour.
Eh bien ça donne envie de dire : ne mélangeons pas tout ! C'est toujours le problème des généralisations, ça.
Lui n'est pas de ceux qui oeuvrent dans des bureaux, dans les services.
Mais de ceux qui bossent au quotidien sur le terrain, au service.
Il est serrurier. 38 ans de boutique. Bientôt la retraite. On lui a refusé la possibilité de former un jeune. De transmettre son savoir faire. Un jour il partira, quelqu'un ne le remplacera pas. Il restera des portes et des serrures à réparer. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise. On fera appel à des privés, évidemment.
Il secoue la tête. Maintenant, il passe son temps dans des procédures. On pourrait en faire trois fois plus qu'avant, pourtant. Mais on en fait deux fois moins, il dit.
Comme une porte qui se ferme. Avant même.