Comedie urbaine

Publié le 11 novembre 2009 par Nicole Guichard

Ce livre est destiné aux flâneurs. Son ambition est de faire entrer dans leur champ de vision les traces laissées, dans notre paysage urbain, par la comédie urbaine : l'enchaînement des traces laissées par d'innombrables acteurs venus de toutes les sphères sociales, enchaînement qui crée nos rues et nos places, ces œuvres collectives. Ces assemblages, véritables tours de Babel, résultent d'équilibres entre les moyens, intérêts, représentations et idées de groupes sociaux qui ne partagent pas la même langue constructive.

La comédie urbaine insiste sur la complexité de l'entreprise collective nommée ville, en attirant l'attention sur les détails bizarres qu'on peut voir dans l'espace urbain, à Paris et dans bien d'autres villes françaises. Ces anomalies ne sont pas des échecs. Elles le seraient si la pertinence d'une forme urbaine était jugée à l'aune de ses concepteurs. La ville réelle n'est pas l'ombre d'une ville idéale. Les livres qui lui sont consacrés sont souvent hantés par le spectre de la cité idéale. Mais la ville est le phénomène imparfait par excellence. En mouvement perpétuel, perçue à partir de points de vue changeants, elle défie tout jugement. Ce livre propose de voir et apprécier autrement les villes, de les regarder comme des œuvres collectives à l'évolution desquelles contribuent des concepteurs, certes, mais également une multitude d'autres acteurs. Comme le langage, la ville se transforme sans cesse et surprend toujours. Est-ce si grave ? Pas pour le promeneur qui, en chaque lieu ou presque, comme le libertin de Kundera, est mu par le désir de s'emparer de l'infinie diversité du monde. Surtout s'il ne projette pas sur les villes un idéal subjectif. Bien sûr, personne ne vit dans un état permanent de bien-être absolu. Mais chacun peut apprécier les moments où il est en paix avec la ville telle qu'elle est, malgré ce qu'elle est. Michaël Darin a étudié la philosophie et la sociologie à Jérusalem (licence à l'université hébraïque), l'architecture à Londres (diplôme d'architecture délivré par l'A.A. School of Architecture) et l'histoire à Paris (DEA, Doctorat et HDR à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales). Il a enseigné à l'Ecole d'architecture de Nantes, pendant une vingtaine d'années, le projet et l'histoire de l'architecture. Depuis une dizaine d'années, il occupe à l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Versailles le poste de professeur d'histoire de l'architecture et de la ville. Après avoir exercé un temps en tant qu'architecte praticien, il s'est tourné vers la recherche. Sa thèse (sous la direction de Marcel Roncayolo) portait sur le percement des grandes voies urbaines pendant la deuxième moitié du XIXe siècle. Dans la foulée, il a écrit une monographie sur le boulevard Saint-Germain ; consacré une recherche à l'alignement, politique urbaine qui donne leur style aux vieilles rues françaises ; mené des études sur les places de Nantes et de Paris, et sur les boulevards un peu partout en France ; travaillé sur l'urbanisme du 20e siècle - histoire d'une ZUP à Nantes, enquête sur les bons espaces publics modernes en France, recherche sur les voies secondaires dans les ZUP. Enfin, il s'est intéressé à la relation entre ville et langage, les deux œuvres collectives les plus fabuleuses de l'homme, selon Mumford.