Histoire d’un médaillé de la légion du déshonneur
Dans la série « mes lecteurs ne sont pas des idiots et sont tout à fait capables de se forger leur propre opinion au vu des pièces du dossier », j’ai décidé de vous exposer aujourd’hui les tenants et les aboutissants de l’affaire du Goncourt.
L’origine du crime de lèse-majesté : un interview de Marie Ddiaye, Goncourt 2009 pour « Trois femmes puissantes » publié dans les Inrocks du 30 août 2009, repris par Rue89 et que de nombreux français pourraient reprendre à leur compte… Jugez vous-mêmes :
« Vous sentez-vous bien dans la France de Sarkozy ?
« Je trouve cette France-là monstrueuse. Le fait que nous (avec son compagnon, l’écrivain Jean-Yves Cendrey, et leurs trois enfants – ndlr) ayons choisi de vivre à Berlin depuis deux ans est loin d’être étranger à ça. Nous sommes partis juste après les élections, en grande partie à cause de Sarkozy, même si j’ai bien conscience que dire ça peut paraître snob. Je trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité… Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux. Je me souviens d’une phrase de Marguerite Duras, qui est au fond un peu bête, mais que j’aime même si je ne la reprendrais pas à mon compte, elle avait dit : “La droite, c’est la mort.” Pour moi, ces gens-là, ils représentent une forme de mort, d’abêtissement de la réflexion, un refus d’une différence possible. Et même si Angela Merkel est une femme de droite, elle n’a rien à voir avec la droite de Sarkozy : elle a une morale que la droite française n’a plus. »
→ Réaction de Monsieur Raoult, diplômé de l’institut français de presse, chevalier de la légion d’honneur décoré par Jacques chriac en 2001, député de la 12e circonscription de la Seine-Saint-Denis. président de la Fédération UMP de Seine-Saint-Denis depuis sa création, Maire du Raincy, défenseur du rétablissement de la peine de mort, et Président du groupe parlementaire d’amitié France-Tunisie, fonction en qualité de laquelle il a approuvé publiquement le 31 octobre 2009 sur Berbère Télévision l’expulsion de Tunisie de la journaliste du Monde Florence Beaugé :
« Monsieur Eric Raoult attire l’attention de M. le ministre de la Culture et de la Communication sur le devoir de réserve, dû aux lauréats du Prix Goncourt.
En effet, ce prix qui est le prix littéraire français le plus prestigieux est regardé en France, mais aussi dans le monde, par de nombreux auteurs et amateurs de la littérature française.
A ce titre, le message délivré par les lauréats se doit de respecter la cohésion nationale et l’image de notre pays. »
« Le droit d’expression ne peut pas devenir un droit à l’insulte »
Je ne vois pas en quoi il y a ici délit d’insulte caractérisé dans la mesure où Marie a employé pour ce qu’on pourrait supposer comme étant le mot le plus fort en négatif de son entretien celui de « monstrueux », qui a mon sens ne saurait constituer ce caractère insultant. Il y a des insultes bien plus réelles qui n’ont pas fait l’objet de condamnation du chef de l’état, qui en l’occurrence devrait se montrer encore bien plus exemplaire qu’un prix goncourt, comme le célèbre « casse-toi pôvcon ».
Par ailleurs, Marie n’étant à ma connaissance ni fonctionnaire ni militaire, ledit devoir de réserve ne s’applique donc pas, j’ai vérifié. Monsieur Raoult est donc malvenu. Pour le moins… Et contribue de par son attitude à donner l’image d’un UMP attentatoire aux libertés fondamentales, et plus particulièrement de celle si chère aux yeux des français qu’est la liberté d’expression, ce qui est fort dommage pour la crédibilité et la cohésion de la majorité gouvernementale à l’heure où son collègue Besson veut instaurer un débat sur l’identité nationale dont elle est constitutive. Pas de bol, gros : trop nul !