Le jeune réalisateur Kim Young-jo décide pour son documentaire de fin d’études Portrait de famille (2007) d’aborder un sujet qui lui est personnel et cher : la découverte de l’existence d’un père qu’il croyait décédé.
Kim Young-jo souffre de l’absence de son père et développe une curiosité à son égard. Sa mère lui apprend la vérité à son sujet : il n’est pas mort et est parti à sa naissance en faisant acte d’abandon. Aujourd’hui, ce père est marié à une autre femme et a une famille. Suite à cette révélation Young-jo décide d’aller à sa rencontre…
Portrait de famille va au-delà de tout sentiment pudique. L’auteur Kim Young-jo dépasse cet état pour se mettre en scène dans ce documentaire où il est le principal protagoniste. Il fait le choix d’un sujet qui le concerne en tentant de comprendre la disparition d’un père et d’aller à sa rencontre pour le connaître et trouver réponses à des interrogations qui perturbent l’existence de l’homme qu’il est. Pour ce faire, le cinéaste se filme et filme ses proches (mère, tantes, amies…), se lançant dans une investigation qui le mènera jusqu’à l’être absent de sa vie : son père.
Pourtant, Portrait de famille interroge sur la mise en scène employée. Une mise en scène tellement présente qu’elle tue le style documentaire, donnant l’impression d’assister à un docu-fiction. On sent un naturel faussé dans sa réalisation, renforcé par un montage qui laisse peu de place à l’improvisation. A tel point qu’on se demande si Kim Young-jo ne joue pas son propre rôle au lieu d’être tout simplement lui-même. Autre chose frappe : la dextérité dont font preuve la mère et le père face caméra, totalement désinhibés devant l’objectif : sont-ils familiers du fait ? Les scènes ont-elles étaient faites et refaites à plusieurs reprises… ? Une incompréhension et un manque de spontanéité nt : comment a-t-il pu imposer l’immersion si parfaite de sa caméra au sein de sa démarche, avant tout personnel ?
On peut comprendre le montage, puisqu’il en existe comme dans tout documentaire, mais il y a ce quelque chose de perturbant dans la façon dont les protagonistes s’adressent à la caméra, sans gène, sans timidité, sans hésitation ni même rire nerveux. On a davantage de plaisir à contempler et à saisir le sens de sa démarche dans les plans où la caméra se cache, témoin discret d’une rencontre si particulière. Le sujet est délicat et l’acceptation de la caméra d’un homme qui a pour passé l’abandon d’un enfant semble difficilement crédible. Un homme, un père qui accuse 30 ans de silence et d’absence.
Ne mettant pas en doute la sincérité de la démarche de l’auteur, que ce soit d’un point de vue personnel, que dans la volonté qu’il a de révéler un sujet répandu, mal-être d’un enfant orphelin d’un parent, Portrait de famille laisse derrière lui un aspect dérangeant dans sa forme. Il n’en reste pas moins un beau projet universel qui marque indéniablement.
Diana & I.D