"J'ai besoin de me défouler... Je sors d'un mini stage sur l'utilisation de l'outil informatique dans l'enseignement des mathématiques et ça fait peur de voir comment certains sont allumés ! Leur discours est bien rôdé, ils ont réponse à (presque) tout : ce serait des agents publicitaires des grandes marques déguisés en profs de maths que ça ne m'étonnerait que moyennement. Alors selon eux, l'échec de nos élèves en maths ne vient pas du tout du fait que l'équivalent d'une année de mathématiques leur a été supprimée au collège à grand coup de réformes, mais du refus des profs réac' d'utiliser le(s) magnifique(s) ordinateur(s) que l'agent comptable leur a acheté(s) pour Noël 2007 suite à la future apparition d'une épreuve de TP de mathématiques au baccalauréat.
Tout d'abord, nous avons la joie de plancher sur 4 sujets "zéro" proposés par l'Inspection pour mesurer les compétences mathématiques et informatiques exigées à l'examen. Nous voilà rapidement au coeur du problème : des sujets ridiculement simples et réducteurs se limitant à 1 ou 2 notions vues en TS, ou des sujets horriblement difficiles sur lesquels même le prof doit s'y reprendre à plusieurs fois ou demander discrètement de l'aide à son voisin pour l'utilisation d' un logiciel abscons.
On nous abreuve d'arguments du type : "mais quelle précision dans la construction !" "... trois clics de souris, et on peut déjà émettre une conjecture !..."
Conjecture ! Voila le mot magique... J'essaie d'habituer mes élèves à ce nouveau mot qu'ils rencontreront obligatoirement dans leur sujet de bac. Mais comment fait-on pour conjecturer ? Et que doit-on exiger de l'élève ? "Pas forcément la bonne conjecture" nous répond-on. "Si l'élève se plante dans sa partie programmation et croit voir une conjecture (forcément fausse) se profiler à l'horizon, vous ne devez pas intervenir de manière directive". Bref, on le laisse s'embourber et on se marre : car de toute manière, seulement 1 point sur 4 est réservé à la partie démonstrative. Pis : l'élève se verra gratifié du point s'il propose une méthode cohérente pour démontrer son résultat faux.
Mais au fait, quelle est la probabilité qu'un élève trouve "la bonne conjecture" ? Expérimentalement, je dirais proche de zéro. Dans une classe de 15 élèves qui travaillent (en commun) sur le même problème, 10 minutes suffisent généralement pour que de fil en aiguille un bon élément compile tout ce qu'il a entendu autour de lui et dise la phrase magique que tout le monde s'empressera de s'approprier ! Bref, ca se passe plutôt bien...
Mais le jour de l'examen, ils seront 4 dans la pièce à travailler sur 4 sujets différents. Le taux de réussite risque d'être bien plus réduit.
De plus, pour avoir côtoyé (brièvement) le milieu de la recherche, je pense en avoir retenu quelque chose d'important : à la suite d'une première expérience, on ne fait jamais de bonne conjecture ! La première idée qui nous vient à l'esprit est souvent trop réductrice, ambitieuse ou simplement... fausse !"
La suite est ici