En Europe, le droit public paraît être entré en crise. Le cadre national, traditionnel, semble désormais trop étroit pour expliquer, interpréter et construire ce que l’on continue à appeler le « droit public » et même, d’ailleurs, le droit international public. Cette crise est évidemment liée à la mise en cause profonde de l’État moderne : son « monopole de la violence légitime », qui se traduisait par l’idée juridique de souveraineté, a perdu son évidence et, peut-être, sa légitimité. Concurrencée par les pouvoirs internationaux, supranationaux mais aussi locaux, la puissance publique de l’État apparaît moins, dans la « constellation post-nationale », comme le fondement du droit que comme l’enjeu d’une confrontation de forces qui la débordent et la relativisent. Dans le monde globalisé, c’est aussi l’emprise traditionnelle de l’État sur la société civile qui est remise en question. On voit apparaître depuis la fin du siècle dernier de nouveaux concepts à travers lesquels la science du droit s’efforce d’appréhender les structures et les interactions nouvelles au cœur desquelles se trouve aujourd’hui l’État.
L’époque est au changement de paradigme : régulation, gouvernance, Steuerung (pilotage) devraient suppléer les insuffisances de la notion de « puissance publique » qui servit de base aux grandes constructions doctrinales du droit public vers la fin du XIXe siècle. Les méthodes mêmes du droit public en sont affectées.
La représentation verticale du rapport entre l’État et le citoyen s’efface relativement au profit d’analyses plus horizontales de cette relation (participation, contractualisation). La notion même de « constitution » se complexifie dans le cadre des doctrines du constitutionnalisme multilevel. La légitimité de la démocratie représentative paraît épuisée. La neutralisation au moins apparente des systèmes à travers le renforcement du rôle de ces « tiers impartiaux et indépendants » que sont les juges semble s’imposer comme un horizon nouveau de la politique de notre temps. Ces remaniements profonds des doctrines, qui tentent de rendre compte de réalités nouvelles, peuvent être compris comme les signes d’accompagnement d’une mutation radicale de la forme institutionnelle classique qu’est la construction, depuis la fin du Moyen-Âge, de l’État en Europe.
La doctrine du droit public est donc convoquée, aujourd’hui, pour repenser les cadres institutionnels dans lesquels peuvent être saisis et maîtrisés ces phénomènes d’éclatement, de pluralisation et de déformalisation des processus politiques.
L’objet du présent colloque est d’interroger ces mutations du droit public à partir, précisément, de la question qui lui est essentielle : la question de son articulation à la politique. Une telle interrogation doit croiser autant que possible les regards, les regards disciplinaires (droit constitutionnel, droit administratif, droit international, histoire du droit) aussi bien que les regards nationaux afin de saisir aussi précisément que possible l’ampleur et les enjeux de cette « grande transformation ».
C’est pourquoi ce sont neuf juristes européens, parmi les plus réputés, qui sont invités à livrer leurs réflexions sur le destin du droit public à partir de sa relation fondamentale à la politique. Neuf leçons donc, qui feront à Strasbourg, pour l’anniversaire de la Confédération Européenne des Universités du Rhin supérieur (EUCOR) et dans le cadre de l’Université nouvelle, un événement exceptionnel et unique en son genre.
Institut de Recherches Carré de Malberg
Fédération de Recherche CNRS/UDS n°3241 «L’Europe en mutation: Histoire, Droit, Économie et Identités culturelles»
20e Anniversaire du Réseau EUCOR
Colloque international
Politique(s) du droit public: neuf leçons européennes
Vendredi 27 et Samedi 28 novembre 2009
Université de Strabourg
(Faculté de Droit, 1 place d’Athènes, aphi. Carré de Malberg)
Responsable scientifique:
Olivier JOUANJAN, professeur aux universités de Strasbourg (France) et Fribourg-en-Brisgau (Allemagne)
Programme
Vendredi 27 novembre 2009
Matin
Présidence Constance GREWE, Professeur à l’Université de Strasbourg (France), Juge à la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine
9H15-9H30. - Accueil des participants par les représentants du réseau EUCOR de l’Université de Strasbourg et de la Faculté de droit
9H30-10H15. - Michel TROPER (en français), Professeur émérite à l’Université Paris X-Nanterre (France)
10H15-10H45. - Discussion
10H45-11H00. - Pause
11H00-11H45. - Martin LOUGHLIN (en anglais), Professeur à la London School of Economics (Grande-Bretagne)
11H45-12H15. - Discussion
Après-midi
Présidence: Johannes MASING, Professeur à l’Université de Fribourg-en-Brisgau (Allemagne), Juge à la Cour constitutionnelle fédérale d’Allemagne
14H15-15H00. - Sabino CASSESE (en français), Professeur à l’École Normale Supérieure de Pise (Italie), Membre de la Cour constitutionnelle italienne
15H00-15H30. - Discussion
15H30-15H45. - Pause
15H45-16H30. - Pedro CRUZ VILLALON (en français), Professeur à l’Université autonome de Madrid (Espagne), Ancien président du Tribunal constitutionnel espagnol
16H30-17H00. - Discussion
17H00-17H45. - Olivier BEAUD (en français), Professeur à l’Université, Paris 2 (Panthéon-Assas)
17H45-18H15. - Discussion
Samedi 28 novembre 2009
Matin
Présidence: Anne PETERS, Professeur à l’Université de Bâle (Suisse)
9H30 – 10H15. - Armin VON BOGDANDY (en anglais), Directeur de l’Institut Max Planck pour le droit public comparé et le droit international public (Heidelberg, Allemagne)
10H15 –10H45. - Discussion
10H45 – 11H. - Pause
11H – 11H45. - Martii KOSKENNIEMI (en anglais), Professeur à l’Université d’Helsinki (Finlande)
11H45 – 12H15. - Discussion
Après midi
Présidence: Patrick WACHSMANN, Professeur à l’Université de Strasbourg (France)
14H15-15H. - Pierre MOOR (en français), Professeur émérite à l’Université de Lausanne (Suisse)
15H-15H30. - Discussion
15H30-15H45. - Pause
15H45-16H30. - Michael STOLLEIS (en allemand), Directeur de l’Institut Max Planck pour l’histoire européenne du droit (Francfort, Allemagne)
16H30-17H. - Discussion
17H-17H30. - Conclusion par Olivier JOUANJAN, Professeur aux Universités de Strasbourg (France) et Fribourg-en-Brisgau (Allemagne)
Renseignements pratiques:
Les conférences sont prononcées en français, en anglais ou en allemand. Un résumé en langue française sera distribué.
Entrée libre mais inscription obligatoire
Lieu du colloque:
Université de Strasbourg, Faculté de Droit (Amphi Carré de Malberg) 1 place d’Athènes, BP 66
67045 Strasbourg Cedex
Accès:
Accès depuis l’aéroport: Prendre le train jusqu’à la gare centrale de Strasbourg
Accès depuis la gare: tram A direction Illkirch; changement station «Homme de Fer», tram C direction Esplanade, arrêt «Universités»
Inscription:
Entrée libre mais inscription obligatoire
Aurélie KRAFT, Université de Strasbourg, Fédération de Recherche CNRS/UDS n°3241, 11 rue du Maréchal Juin, BP 68, 67046 Strasbourg cedex
Tél: 33(0)3.88.14.30.23 / Fax : 33(0)3.88.14.30.24
programme (PDF) et renseignements complémentaires