Il est dans mes mains en ce moment, ce livre, dans ma tête et... dans mon coeur.
Et vous...Voici, sans commentaires :"Dites ! Dites-moi comment ne pas aller contre l’arrogance du monde des riches ? Contre la nouvelle barbarie de l’abandon de l’homme, contre le monde cloisonné ou triomphent les violents ? M’est avis que nous n’irons pas loin si nous continuons à faire confiance à nos oreilles assourdies par l’argent. Que nous ne respirerons plus bien longtemps si nous confions notre course à nos poumons asphyxiés par le toc et le truc.
Etre le premier ! Marcher sur les autres ! Mais se hâter vers quoi ? Vers quoi courons-nous tous ? Où nous entraînent nos gouvernants ? Nos banques ? Nos boissons rafraîchissantes ? Dans quel sillage ? Vers quel trésor ? Posséder ? Prendre le pouvoir ? Celui des images ? Celui du Burger King ? En quelle forêt de l’esprit sommes-nous transportés ? Faut-il être con, veau et millionnaire à la fois ? Et si le trésor n’existait pas ?
À supposer que l’optimisme ou l’inconscience (qui sont de mise) consiste à se boucher les yeux, je ne vote pas pour gribouille ! Je ne me résigne pas !
Plus ! Quand je dévisage les modèles qu’on propose aux petits, à la jeunesse, j’écume à plein ! Je déraille ! Pauvres starnigauds pommadés champions en huit semaines ! Lofteurs-zéros lubrifiés à l’aventure bidon ! Ados embrigadés dans le surf perpétuel de la mode et des idées courtes lancées par les lucarnes du prêt-à-penser ou les trompettes du consumérisme ! J’en gerbe ! Notez, en écrivant les mots du cœur, je n’accomplis que les gestes dérisoires de la survie. On se moquera sans doute. N’importe ! Je fais mon boulot d’écrivain. Plus fort que jamais je crie : comment ne pas être en rebiffe permanente contre les algues vertes qui recouvrent la pensée contemporaine ?" Jean Vautrin La vie Badaboum p.97-98 éd. Fayard mai 2009