Dans Les Herbes folles, la fantaisie reste présente, mais je ne trouve pas ce film si léger qu'on le dit. Ça part d'un truc tout bête : un type (André Dussolier, parfait et toujours séduisant) trouve un portefeuille dans un parking et fantasme sur sa propriétaire (Sabine Azéma, dentiste de caractère et pilote de petits coucous à ses heures perdues). Je ne vais rien déflorer de plus, car ça n'est pas un film banal. Je n'avais pas lu le roman de Christian Gailly, L'Incident (éditions de Minuit), dont il s'inspire, mais je vais courir l'acheter. La voix off du délicieux Edouard Baer est d'ailleurs non seulement drôle, mais très littéraire. D'un vol… on arrive à un vol. Mais que de loopings entre ces deux événements ! Burlesques ou surréalistes, l'efficacité des scènes doit aussi beaucoup au talent des comédiens, en particulier Amalric, qui campe un flic flegmatique.
Ce film donne à réfléchir sur les rencontres improbables, liées à des événements a priori insignifiants. Ça m'est arrivé, parfois, et c'est plus que troublant. On a à la fois l'impression d'être une marionnette, et l'impression d'en tenir les fils. Il parle aussi de tout ce qu'on a dans la tête, et de ce que ça donnerait (ou pas) si l'on décidait de passer à l'acte : suivre quelqu'un dans la rue, répondre à un texto qui ne vous est pas destiné, essayer d'appeler le numéro de portable que Benjamin Biolay donne dans son dernier album… Mais force est de constater que la vie n'a bien souvent que peu à voir avec le cinéma et les romans. La dernière fois que j'ai fait du gringue à quelqu'un, à cause (ou grâce ?) à un coup de X Noir de trop, je me suis pris un sacré râteau ! Heureusement qu'il y a les livres, le cinéma… et les herbes folles pour se consoler. Et les bulles, pour se sentir plus léger.