La stratégie est limpide : déplacer les projecteurs et caméra braqués depuis quelques temps sur les polémiques internes de la majorité vers un sujet éculé sur lequel on est sûr que la gauche va foncer tête baissée.
Pas sans arrières pensées électoralistes. Le gouvernement table sur une reconquête de l’électorat de la droite de la droite. Noël Mamère ne s’y est guère trompé qualifiant la manœuvre de “Recherche Le Pen désespérément“.
Selon le ministre de l’intérieur la part des mineurs dans la délinquance a augmenté de près de 5 % en un an, pour atteindre 18 %. Cette délinquance des mineurs serait également de plus en plus violente, avec l’apparition d’armes blanches et d’armes létales et de plus en plus jeune. Face à ce constat, Brice Hortefeux se déclare “de plus en plus partisan d’une mesure qui aurait le mérite de la simplicité, de la lisibilité et de l’efficacité: qu’un jeune de moins de 13 ans qui aurait déjà commis un acte de délinquance ait une interdiction de sortie nocturne s’il n’est pas accompagné d’un adulte“.
Une réflexion, pas une décision a bien spécifié le ministre qui a précisé que, si ce «couvre-feu» entrait en application, il s’agirait d’une mesure administrative, puisqu’il s’agirait de “permettre au préfet de décider de l’interdiction de sortie (du) mineur une fois la nuit tombée“.
Simplicité, lisibilité et efficacité ?
Totalement faux pour Emmanuelle Perreux, la présidente du Syndicat de la magistrature qui, au micro de France Info , dénonce “le fantasme et la surenchère“. “C’est une fois de plus une déclaration totalement démagogique. C’est une mesure dont on voit mal comment elle pourrait être appliquée puisqu’il n’est pas marqué sur le front de nos enfants qu’ils ont commis un acte de délinquance. Elle remet encore l’éclairage sur les mineurs comme s’il fallait se méfier de nos enfants. Le ministre prétend que la violence des enfants de moins de 13 ans augmente, c’est faux. Il y a des études sociologiques qui ont démontré exactement l’inverse“.
Au sein même de la majorité, ça devient une habitude, le député UMP des Yvelines Pierre Cardo, se déclare “extrêmement réservé sur la mise en œuvre” et place le ministre de l’intérieur face à ses contradictions en estimant que “ça pose quand même un problème de moyens“. “Ca pose plusieurs questions. D’abord, les mineurs de moins de 13 ans qui se proménent la nuit ne sont pas tous des délinquants. Pour la plupart ils n’ont pas de papiers d’identité sur eux. Conclusion, c’est mon avis, ça va poser quelques petits problèmes d’identification d’autant que la nuit on a pas autant de policiers que ça qui se promènent dans nos quartiers. Aujourd’hui dans nos quartiers, nous avons des gens qui ont une interdiction de séjourner sur le territoire, je les vois assez souvent dans la journée. Je n’ai pas l’impression assez souvent que les services de police arrivent à les identifier“.
Si Nicolas Comte du syndicat de police SGP-FO partage le constat et estime qu’il existe “un vrai problème avec la délinquance des mineurs“, il juge toutefois que l’idée est “totalement inapplicable“. Le syndicaliste relève la schizophrénie du gouvernement “qui s’engage dans une politique de réduction d’effectifs de la police nationale qui est assez importante” mais aussi le fait qu’on ne peut pas reconnaître un mineur délinquant sauf … à les contrôler tous.